Canyon Lux TR CF 9 Emily Batty : Mise à jour

Le nouveau Lux Trail de Canyon est une mise à jour subtile de leur vélo tout-suspendu qui a fait ses preuves depuis 2019 lors de la Coupe du monde XCO. Il arrive avec un peu plus de débattement et une géométrie modifiée pour le rendre plus apte au trail. Enfin, c’est ce que l’on pensait…

DR. B.L

Prix : 5 799 € | Poids :11,15 kg taille M, roues 4,78 kg | Déb. av. 120 mm | Déb. ar. 110 mm / Pratique : cross-country, marathon / Terrain : plaine, vallonné

Pour cette saison 2022, Canyon a décidé de s’attaquer à son Lux pour lui donner un peu de renouveau. Voilà donc le Lux Trail qui propose quelques changements finalement assez discrets mais qui viennent s’ajouter au tempérament déjà très agréable du Lux, à savoir d’être un VTT léger qui grimpe bien et qui est aussi amusant dans les descentes. Pour autant, malgré ce qui est annoncé, il nous est difficile de ne pas parler de “downcountry” (terme très à la mode ces derniers temps), c’est-à-dire d’un VTT à l’aise sur un plus grand nombre de sentiers. Le Canyon Lux Trail reste un vélo qui vous permettra de prendre le départ d’une course de cross-country, de marathon aussi, mais sans le côté joueur que peuvent avoir certains concurrents. Mais avant, voyons ce qui évolue. Le nouveau Canyon Lux Trail fait très légèrement évoluer son débattement par rapport au Lux classique au point de se demander si vraiment un tel changement était nécessaire. D’ailleurs, au premier coup d’œil, personne ne remarquera vraiment les 10 mm de débattement supplémentaires à l’avant et à l’arrière. Ainsi devant vous passez à 120 mm quand la version Lux SL affichait 110 mm (100 pour la Lux SLX). L’arrière gagne 10 mm, passant de 100 à 110 mm par un drôle de tour de magie parce que l’entraxe et la course de l’amortisseur sont les mêmes : 210×55 mm. Mystère… Si on devait résumer, seul le triangle avant du Canyon Lux Trail est nouveau. Mais c’est suffisamment important pour remettre à plat le comportement de ce vélo.

Un triangle avant beaucoup plus long

L’augmentation du débattement est la partie découverte de l’iceberg parce que la vraie modification concerne le triangle avant. En effet il s’allonge carrément puisqu’en taille M, le reach (ou allonge en français) gagne près de 20 mm et 25 mm sur les plus grandes tailles, et presque 20 mm sur le tube supérieur. Au passage, l’angle de direction s’ouvre (même si les puristes de la physique diront se referme) de -2,5° par rapport au Canyon SLX (70°). Pour le reste, il partage la même hauteur de boîtier de pédalier et de tube de selle. L’idée derrière cette croissance est d’offrir un vélo plus stable, qui met le pilote plus en sécurité dans les descentes. Notez aussi que ce nouveau Lux Trail partage le même triangle arrière que les Lux SL et SLX. Il s’agit donc d’une suspension monopivot avec une flexibilité dans les haubans et une biellette pour piloter l’amortisseur. Le Lux Trail loge son amortisseur sous le tube supérieur (attention l’accès à la détente n’est pas aisé avec des gants). Une position qui permet une meilleure réaction sur les chocs, mais aussi de libérer de l’espace dans le triangle avant. Et ce Lux Trail n’en manque pas pour placer deux grandes bouteilles d’eau dans chaque taille de cadre. Vous pourrez ainsi rouler longtemps sans sac sur le dos ou mettre vos outils dans le second bidon. Tous les modèles comprennent un système de verrouillage avant/arrière des suspensions depuis le guidon. Notez que Canyon utilise une manette Fox (logique avec notre modèle) mais qui est remplacée par une manette tournante avec les suspensions RockShox, qui fonctionne dans le bon sens. En effet, cela peut paraître fou mais généralement chez Fox, par défaut la commande des suspensions les bloque. Il faut l’actionner pour les débloquer. Là, par défaut, elles sont ouvertes et proposent deux options de blocage avec deux courses sur la manette. Une intermédiaire qui durcit les suspensions et une autre qui les bloque. Ok, dans l’action ou avec la fatigue, il n’est pas facile de trouver le réglage médian, mais il a le mérite d’être là. Si l’on parle parle poids, il faut comparer le SL au Trail : ils utilisent la même qualité de fibres. En effet, le Lux CF SLX adopte une fibre plus légère qui lui permet d’afficher 1 662 g. Ici, le Lux Trail est annoncé à 1 895 g en taille M, ce qui est tout de même 43 g de plus que la version SL. Alors pourquoi ? Parce que pour avoir un triangle avant plus long il lui faut plus de matière. Bon, il faut y voir le bon côté des choses, cela permet de proposer un modèle à 3 299 € en entrée de gamme (Shimano SLX, 12 vitesses, Fox 34 SC Performance) contre 4 299 € pour la version allégée. Comme tous ses congénères, le Lux Trail intègre le passage de la câblerie dans son cadre. Et comme eux, le chemin des passages des gaines arrière passe derrière le boîtier de pédalier pour repartir dans le triangle arrière. C’est beau, propre… enfin presque puisque c’est aussi dans cet espace que vient se loger toute la boue projetée par le pneu arrière. Cette zone est vraiment compliquée à nettoyer. Notez aussi que Canyon a repris le fameux blocage de direction pour éviter que les commandes ne viennent au contact du tube supérieur. Alors même si nous préférions la première génération qui disposait d’un blocage intégré dans la cuvette de direction (ici, le blocage est uniquement externe et parfois la potence tourne au contact du système et vient quand même mettre en contact les commandes avec avec tube), il a le mérite d’exister et évitera tout contact, notamment lorsque vous mettrez le vélo couché sur les sièges arrière de votre voiture. Notre modèle de test est une version un peu spéciale puisqu’il s’agit du Trail CF 9 Emily Batty Replica (la pilote phare de l’équipe internationale de cross-country de Canyon). Haut de gamme de la série Lux Trail, il ne fait l’impasse sur aucun équipement de qualité. A part le poste de pilotage qui se pare d’aluminium alors que l’on aurait pu espérer un cintre carbone, tout ici respire le luxe. Le pédalier Race Face Newt SL est le plus léger du marché, les DT Swiss Carbone sont le meilleur compromis sur ce segment et tout est à l’avenant. Il faudra s’acquitter de 5 800 € pour l’acquérir. Autant dire que l’on est loin des prix astronomiques demandés par d’autres marques pour un produit similaire. Alors oui, Canyon est vendu sur Internet (quand les stocks sont là) mais l’excuse du réseau de magasins (et de leur marge) ne suffit pas à lui seul à justifier des prix de 2 000 voire plus, supérieurs.

Lux Trail, vraiment ?

J’ai roulé le Lux CF SLX il y a maintenant près de trois ans, et mon souvenir de ce vélo est encore intact. Certes il faisait 1 kg de moins sur notre balance, mais j’avais été impressionné par ses aptitudes en montées au point de parler de « folie en montée », « d’un grip et d’une motricité tout bonnement impressionnants. » Mais c’était aussi une bête de rendement, qui en descente ne se laissait pas démonter, avec des suspensions qui encaissaient sans broncher même les successions de chocs rapides, un vélo qui se plaçait facilement et qui tournait autour des arbres sans rechigner. Alors forcément avec une géométrie plus moderne pour cette version Trail et un peu plus de débattement, j’avais de quoi être enchanté. La suspension correctement réglée avec 23 % d’affaissement à l’arrière, et 25 % à l’avant, je pars pour un tour de rodage. Aïe, le cadre est vraiment plus long et même avec la potence de 60 mm, je ne suis pas bien en place, c’est long, trop long. Clairement, là où mon 1,71 m avait sa place sur le Lux classique en taille M avec une potence de 60 mm (au lieu de 80 mm d’origine), là ce n’est pas jouable. Il m’aurait fallu un taille S… Qu’à cela ne tienne, je passe sur une potence de 35 mm et j’avance la selle au maximum pour retrouver mon allonge de jambe au pédalage. D’ailleurs, quel dommage de ne pas avoir profité du travail sur le triangle avant pour redresser le tube de selle : non seulement on y aurait gagné en position assise avec certainement un meilleur travail de l’amortisseur (le poids du pilote étant mieux réparti), mais en plus le vélo aurait été encore meilleur dans les ascensions raides…

Dans tous les cas, le vélo gagne en empattement avant, ce qui lui confère un surcroît de stabilité, que ce soit dans les lignes droites ou dès que la piste devient plus technique en descente. Dans les côtes, la stabilité du cadre tranche avec la direction qui est assez vive avec la potence plus courte et ce, malgré la direction plus couchée. En descente, oui le Lux Trail rassure par son imposante stabilité et par une rigidité retrouvée sur sa partie avant (merci la 34 SC) mais, il y a un mais, il a perdu son grain de folie. Le vélo impose beaucoup plus d’engagement pour l’emmener exactement où l’on veut, pour l’inscrire dans les virages serrés, pour le faire bouger d’une ligne à l’autre. Il a perdu sa polyvalence qui lui donnait ce caractère si plaisant. Mais plus encore là où le Lux Trail a perdu de sa prestance, c’est sur son amortissement. Si je le compare avec l’Orbea Oiz testé le mois dernier, le Canyon manque cruellement de confort. Alors peut-être que les ingénieurs ont voulu calquer la suspension arrière sur le manque de déclenchement de la SC34 sur les petits chocs, mais je ne suis pas sûr que se soit une bonne idée au final. Alors certes, le vélo ne pompe pas, et finalement on ne se sert quasiment jamais du blocage de suspensions, mais la roue arrière perd en motricité. Et c’est flagrant dans les montées parsemées de racines. La roue arrière butte et rippe, il faut alors plus de dextérité pour conserver l’arrière au sol. Et puis le phénomène empire avec la pente. Je m’explique. Plus je monte les vitesses à l’arrière de la cassette, plus la suspension arrière se durcit sur l’effet de tension de la chaîne. Cela se ressent dès le milieu de cassette et c’est d’autant plus fort que vous grimpez vite en étant sur le bec de selle donc avec moins de précontrainte à l’amortisseur. La solution serait de passer la précontrainte de base de 23 à 25 voire 30 %, mais dans ce cas, la fin de course est trop linéaire et vous allez rentrer trop vite dans le débattement (sauf à ajouter des cales dans l’amortisseur…). Autant vous dire que niveau mise au point, ce Canyon Lux Trail demande un peu de temps avant de pouvoir vraiment en profiter à 100 %.

DR. Swann L. Lefèvre.

Un crosseur rassurant plus qu’un VTT de trail

Quoi qu’en dise son nom, le Lux Trail conserve son orientation XC. Est-ce un Lux+, rapide, à l’ADN XC bien ancré, avec un peu plus de polyvalence grâce aux modifications apportées sur le triangle avant ? Oui, clairement, mais il ne sera jamais un vélo à tout faire comme peut l’être le Neuron. Il faut vraiment le prendre comme un pur crosseur avec un peu de débattement, mais pas plus. Dans ces conditions, Canyon aurait mieux fait de l’appeler Lux, même si 120 mm à l’avant peut faire peur aux puristes du cross-country. Ce nouveau Lux Trail est un crosseur qui ne dit pas son nom, même s’il a gagné en stabilité en descente pour s’adapter au mieux aux circuits modernes de cross-country, mais il n’apporte pas la dose de confort dont les vélos de trail que l’on nomme aussi all mountain sont capables. Gardez surtout à l’esprit qu’avec ce Lux Trail vous gagnez une fourche plus rigide, un débattement qui vous offre plus de tolérance, une géométrie qui rassure dans la pente et des pneus plus polyvalents. De quoi l’amener sur des courses marathon à la montagne sans trop vous poser de question.

Ce qu’il faudrait changer

Ce n’est pas tant ce qu’il faudrait changer mais ce qui m’a énervé tout au long de mes sorties à son guidon : la commande de mise en action de la tige de selle télescopique. Enfin, plus précisément le fait que je me mélangeais les pinceaux avec la commande de blocage des suspensions, naturellement placée comme une gâchette sous le cintre. Cette position est tellement habituelle pour une tige de selle télescopique qu’à l’entrée de chaque descente, je bloquais mes suspensions à défaut de baisser la tige de selle. Oups… Un mot d’ailleurs sur la nouvelle Fox Transfer SL, ici proposée en finition Factory. Désormais complètement simplifiée, elle a troqué son air et son huile pour un ressort. C’est plus léger, plus fiable, super rapide à la montée comme à la descente. Reste qu’elle ne propose du coup plus de positions intermédiaires de descente. C’est ou en haut ou en bas. Alors d’accord, elle n’a que 100 mm de débattement, mais dans 70% des cas, la descendre de moitié m’aurait largement suffi. Pas d’objection côté train roulant. Les roues DT Swiss restent performantes et polyvalentes, quant aux pneus Schwalbe, cette nouvelle génération est d’une grande qualité et polyvalence (nous n’avons rencontré aucun problème sur les terrains rendus rocailleux par le ravinement des sentiers à cause des pluies diluviennes du début de l’été). Il faudra juste veiller à rouler avec des basses pressions pour vraiment profiter du grip sur terrain sec et fuyant. Attention, nous avons noté des traces de crampons à l’intérieur du triangle arrière, avec les Schwalbe en 2.35 de large, alors que nous n’avons pas (encore) roulé les jours de boue. Donc un point à surveiller car sur le Lux classique nous sommes en 2.2 de large sans inconvénient (petit rappel, le triangle arrière est le même).

Notre modèle de test a rencontré un souci au niveau de la biellette. En effet, cette dernière allait un peu plus loin que nécessaire au point de venir au contact du tube de selle… Problème d’amortisseur dont la course n’était pas la bonne (pourtant annoncé comme la même que le Lux normal), nous attendons toujours une réponse de Canyon a ce sujet. Gageons qu’il ne s’agisse que d’un problème isolé sur notre modèle de test.

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Caractéristiques

GEOMETRIE

Taille : M
Tube supérieur : 617 mm
Tube de selle : 470 mm
Angle de direction : 67,10°
Angle de tube de selle : 75,5°
Hauteur de douille : 100 mm
Bases : 435 mm
Empattement total : 11275 mm
Hauteur de boîtier : 335 mm
Reach : 457 mm
Stack : 595 mm

FICHE TECHNIQUE

Tailles : S, M, L, XL
Modèle d’essai : M
Cadre : carbone
Fourche : Fox 34 SC Factory, déport de 44 mm
Amortisseur : Fox Float DPS Factory
Freins : Shimano XTR, ø180/160 mm
Dérailleur arrière : Shimano XTR
Pédalier : Race Face Next SL, 175 mm, 34 dts
Commande : Shimano XTR
Cassette : Shimano XTR, 10-51
Roues : DT Swiss XRC 1200 Spline
Pneus : av. Schwalbe Wicked Will Super Race Addx Speedgrip, 29 x 2.40 ; ar. Schwalbe Racing Ralf Super Race Addx Speed, 29×2.35
Potence : Race Face Ride, 60 mm
Cintre : Race Face Next 35, 760 mm
Tige de selle : Fox Transfer SL Factory, 100 mm, ø 30,9 mm
Selle : Selle Italia SLR Manganese

Distributeur : www.canyon.com

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NOTES

Rendement 4,5

Confort 3,5

Maniabilité 3,5

Stabilité 4

Prix/équipement 5

TOTAL : 16,4/20

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On aime : Reste un XC dans son ADN • La performance au roulage • Le rapport prix/équipement

On regrette : Ce n’est pas un VTT de trail • Le tube de selle pas assez redressé • Le manque de motricité • Les suspensions manquent de confort