Orbea Occam S10 : Le VTT avec un grand cœur

Présenté il y a quelques mois, le nouvel Occam a la lourde tâche de jouer le rôle de locomotive de la nouvelle gamme Orbea. De fait, les ingénieurs maison y ont mis tout leur cœur de passionnés : le résultat est exaltant.

Ceci expliquant probablement cela. Le moment fort de cette découverte du cadre est de retrouver le principe jusqu’alors uniquement réservé aux Trek qui consiste à placer l’articulation bases/haubans au niveau de l’axe du moyeu arrière. Ce brevet vieux d’une centaine année est en fait libre de tous droits d’utilisation. Il est ici renommé C9-12 pour la compatibilité qu’il permet avec des axes de serrage des deux diamètres via le replacement des pattes arrière et du moyeu. Une biellette carbone et des points de pivot placés grâce au logiciel Advanced Dynamics (qui a donné son nom à la suspension) le tout régit par un amortisseur Fox RP 23 avec Adaptive Logic aux réglages internes spécifiques et le tour est joué. Enfin, en théorie.Côté géométrie, l’Occam est prévu pour accueillir une fourche en 120 ou 140 mm avec une incidence logique sur les angles de direction et du tube de selle ainsi que la hauteur de boîtier et l’empattement total. Ce qui demeure, c’est le court 420 mm des bases. Pas moins de dix roulements scellés, comme sur le Rallon, dont deux pour le pied de l’amortisseur accentuant encore la sensibilité de l’ensemble. L’étrier de frein arrière est directement fixé sur le hauban aluminium en Postmount avec un disque en 160 mm.

Simplicité

Les gaines sont externes et cheminent sur le tube diagonal, sauf celle du dérailleur avant que le câble traverse. Attention, en cas de remplacement, bien prévoir un liner plastique positionné avant de retirer ce câble sous peine de batailler un moment avec une lampe torche pour refaire sortir le câble sous la boîte de pédalier (qui intègre le guide câble) par le petit orifice, bouché par un insert en silicone vert le reste du reste du temps. Au registre des bémols, on note qu’il n’y a aucune protection autour de la boîte de pédalier, que ce soit en cas de déraillement de la chaîne ou contre les impacts de cailloux. Dommage. Heureusement la garantie à vie est incluse pour le cadre et court deux années pour le reste des composants : de quoi rouler sereinement malgré tout. On remarque aussi que le dérailleur avant est fixé 4 millimètres trop haut par rapport à la couronne 38 dents du double AM XTR. Il ne peut descendre plus parce qu’il est bloqué par le roulement droit de l’axe de la suspension placé juste derrière lui. Le guidage de la chaîne ne sera pas optimal lors des changements ; espérons également ne pas avoir à déplorer trop de sauts de chaîne. Pour ça, on compte sur le dérailleur arrière XTR Shadow + avec son système de stabilisation de la chaîne. Aucun problème par contre lors d’un montage en 3×10 avec un plateau en 42 dents. Pour la couleur : ici en carbon/bleu, il existe en carbon/rouge.

L’immuable postulat de départ qui veut que ” le prix génère le niveau d’exigence ” sera ici une considération majeure de l’analyse. Cette base qui place le pilote, à l’aube de ses premiers tours de roues, à la fois dans la crainte et l’espoir, installe clairement un état de suspens insoutenable, ou presque. Le choix du parcours destiné à la prise de contact aura été orienté d’entrée de jeu pour avoir un état des lieux, sinon exhaustif, déjà très significatif. On a déjà levé partiellement le voile dans les deux lignes d’introduction et le titre, mais en effet… Quel bonheur, quel plaisir intense ! Je ne dirais pas quelle surprise, ce serait offensant pour les techniciens Orbea, mais en effet, si on l’attendait à un niveau de prestation intéressant, jamais on ne s’attendait à pareil enthousiasme. Si dans les faits, il y a bien un ou deux bémols à évoquer comme cette chaîne qui vient frotter le fond de la fourchette du dérailleur avant (pourtant trop haute) sur le 38/36 lorsque la suspension se comprime un peu, c’est un bon 95% de réussite qui, pour le coup, permet de relativiser le prix. Pas un seul segment d’une pratique tantôt tranquille, tantôt sportive voire extrême, n’aura engendré une quelconque réserve. Il y a quelque chose de magique dans ce vélo à commencer par sa géométrie. Je n’ai pas souvenir d’avoir, à ce point, ressenti une telle facilité à choisir et garder une trajectoire dans les côtes techniques. Le guidage est naturel comme rarement. C’est probablement sur ce point que l’Occam est le plus remarquable, et qu’il se distingue de ces concurrents. Evidemment, ça ne s’arrête pas là. Une autre de ses qualités réside dans sa faculté à “repartir” sous l’impulsion d’un coup de pédale lorsque, grimpant à faible allure, une section impose un franchissement “en injection”. Tout converge en ce sens : le train roulant parfaitement optimisé autour de la performance et du rendement pur, mais aussi du contrôle et de l’adhérence ; un cadre d’une tonicité rare qui restitue intégralement l’énergie transmise avec une perception très nette de l’accélération. La position de pédalage contribue aussi largement à mettre le pilote dans les meilleures conditions de confort et d’ergonomie pour se concentrer uniquement sur son effort lorsqu’il doit le produire.

Un vrai plaisir à manipuler

Evidemment, en ne dépassant pas les 11 kg avec pédales, inutile de dire que l’Occam est un plaisir à manipuler. Un poids et une géométrie qui se cumulent avantageusement à un ensemble de suspensions à la fois performant et homogène et encore, la Fox 32 aura eu du mal à pousser le curseur au maximum. Un résultat facilement obtenu, sans avoir eu à jouer sur la pression de l’amortisseur. On a le sentiment qu’il fonctionne aussi bien à 140 qu’à 160 psi. Facile à régler, c’est aussi cette autre définition du confort qu’apporte l’Occam. Par contre, on est loin des 205 psi préconisés pour un pilote de 80 kg. Un jouet ! ça tombe bien, c’est la période. Tous les éléments évoqués en amont font de ce vélo un vrai jouet à piloter. Joueur, mais efficace, c’est bien là l’essentiel, non ? Une efficacité euphorisante, le mot n’est pas trop fort ! Je me suis même surpris, à plusieurs reprises, pourtant en fâcheuse position, à la tombée de la nuit, encore loin de chez moi pour avoir voulu prolonger le plaisir de rouler, hurler de joie, de l’adrénaline plein les veines à utiliser chaque cailloux comme appel, peu importe l’état de la réception. Il faut noter l’importance du dérailleur arrière Shimano XTR + qui a bien l’effet escompté. Sur ce modèle on ne peut plus polyvalent, les descentes sont d’autant plus appréciées qu’elles se déroulent sans aucun saut de chaîne. On avancerait presque l’utopie qu’il remplace un système anti-déraillement. Le plus fou c’est qu’on parle d’un 120 qui offre l’agrément en XC d’un excellent 100 mm et comme d’un enduro (ou presque) en descente. Rapidement l’envie de pousser le vice à monter une tige de selle télescopique a d’ailleurs permis d’exploiter à fond ses qualités de descendeur, quitte à mettre les roues SLR en décalage avec leur seuil de résistance…
Une joie que je ne saurais que trop vous enjoindre à vivre autrement que par procuration, si votre budget le permet, en privilégiant le cadre carbone, la fourche en 120, l’axe de 12 mm à l’arrière et une bonne paire de roues. Pour le reste, à vous de voir, mais croyez-moi sur parole, vous ne serez pas déçu !