Canyon Exceed CFR LTD : Quand performance et tolérance se rencontrent

DR. C. Lefèvre

Cette année, Canyon a renouvelé son modèle phare dédiée aux cross-country pur et dur, l’Exceed. Plus léger, il offre pourtant des lignes moins fluides, qui inspirent moins la sportivité. Est-ce juste un effet d’optique ? C’est ce que nous avons voulu savoir !

DR. B. Lacoste

Prix : 6499 € | Poids : 8,85 kg taille M ; roues 3,65 kg | Déb. av : 100 mm ; ar. – / Pratique : randonnée sportive, compétition, plaine, vallonnée

Je ne vais pas vous le cacher, entre moi et l’Exceed, ce n’est pas une grande histoire d’amour. S’il a toujours su me taper dans l’œil par ses lignes qui du simple coup d’œil transpirent la course, la vitesse, une fois en selle, j’ai toujours eu un sentiment mitigé. Oh non, pas que la performance n’était pas au rendez-vous, bien au contraire, mais il le faisait payer cher. Et je ne parle pas d’argent, Canyon ayant toujours la délicatesse de proposer un rapport prix/qualité dans les meilleurs du tableau. Non, au niveau du confort. Je me souviens encore de cette première rencontre qui m’avait fait exploser la plupart de mes chronos sur mes passages clés, mais qui m’avait value à chaque sortie, de devoir faire la sieste l’après-midi tellement il m’avait rincé. Quand performance ne rime pas avec confort, voilà comme je résumerais l’Exceed. Alors forcément, quand Canyon a annoncé son remplacement, j’étais quelque part heureux et en même temps très en attente de savoir si les ingénieurs avaient pris en compte ce composant clé qu’est le confort, pour permettre à tout à chacun de profiter d’un vélo ultra performant, même sur plus de 30 km !

Les goûts et les couleurs ça ne se discute pas

En deux mots, l’Exceed divise. Il y a ceux qui comme moi lui trouvent des lignes vieillottes avec son triangle avant haut, en témoigne l’absence remarquée d’un fort sloping. Et puis il y a ceux qui lui trouvent des lignes sobres, contenues. De toute façon, pour moi, sur ce segment, ce n’est pas la ligne qui importe, ni la façon dont le vélo a de se présenter, ce qui compte, c’est le résultat sur la balance. Alors on n’en parle plus. Et son poids ? Notre modèle en taille M affiche 8,85 kg, sans les pédales et monté en pneus tubeless. Pas mal pour un modèle équipé d’une tige de selle télescopique ! Alors oui je sais, il s’agit de la DT Swiss D232 One avec son faible débattement (60 mm), mais le principal est là : vous pourrez baisser votre selle en descente tout en gardant le contrôle de votre vélo avec vos cuisses. Que demander de mieux ?

Mais revenons un instant sur ce châssis qui fait tant parler. Pour que notre modèle LTD affiche moins de 9 kg, c’est que son cadre ne doit pas être une enclume. L’ancien Exceed n’était déjà pas lourd puisqu’il était annoncé pour 870 g. Vu que la concurrence a depuis sacrément affûté ses armes, on s’attendait forcément à une baisse. Bingo ! Canyon remet les compteurs à zéro avec un étonnant 740 g tout nu ! Forcément pour arriver à ce chiffre, ils ont dû passer quelques nuits blanches pour trouver les bonnes combinaisons de différentes types de feuilles de carbone, d’optimisation de leur drappage, sans compter l’utilisation de tel type de résine, ou encore faire tourner en continu des ordinateurs pour calculer les volumes optimum de quantité de résine lors de la mise en forme… En tout cas, l’histoire dit que Canyon a été bien aidé par l’accès à la fameuse fibre de carbone nommée M40X du fabricant japonais Toray. Maintenant, moi, quand je lis qu’un cadre est aussi léger, je me dis toujours la même chose : faire un cadre léger c’est facile, le problème c’est que généralement il perd en rigidité. Il faut donc passer sur une fibre plus dure pour le rendre pilotable, et cela donne finalement un bout de bois. Et quand Toray annonce que sa fibre M40X est 30 % plus rigide qu’une fibre classique, cela ne va pas en me rassurant. Mais ne vendons pas la peau de l’ours… Toujours est-il que tous pleins faits, c’est-à-dire avec sa peinture, et tout son accastillage, on arrive à 835 g. Pas mal ! Petite précision au passage, seul l’Exceed CFR dispose de cette fibre « miracle ». Les cadres SLX et CF doivent se « contenter » de feuilles de carbone moins exclusives, ce qui explique que le premier est annoncé à 1015 g et le second à 1312 g.

Une géométrie un brin traditionnelle

On pouvait s’attendre à un peu plus de générosité sur le terrain de la géométrie, il n’en est rien. Canyon a décidé de ne pas jouer dans la même cours que BMC avec son TwoStroke, dont vous pourrez lire l’essai le mois prochain. L’Exceed 2021voit juste son reach s’agrandir de quelques millimètres. Son tube de selle se redresse d’un petit degré, et même si ses bases se raccourcissent à 430 mm sur notre taille M (comptez 425 mm sur les XS et S, 430 mm sur le L et 435 sur le XL), la direction ne semble pas vouloir s’ouvrir plus. Elle ne progresse que d’un demi degré pour s’établir à… 69°. On est loin du BMC et de ses 67°. Peut-on donc clairement parler d’un léger conservatisme sur ce vélo ? Sur le côté géométrie, clairement. Heureusement qu’il y a toujours plein de petits détails sur ce vélo qui montrent que Canyon ne s’est pas contenté de faire un « copier/coller » associé à un lifting du précédent modèle.

Ça commence par ce qui saute aux yeux : son combo cintre/potence d’une pièce. A part Scott avec sa marque Syncros, aucune marque n’a osé proposer ce produit. Même si c’est toujours difficile sur un tel produit de trouver la bonne géométrie de l’ensemble et surtout le bon compromis rigidité/souplesse, Canyon profite de son expérience acquise en route, et sur son modèle proposé sur son Spectral:On pour récidiver ici. Le CP08, c’est son nom, est proposé ici avec une largeur de 760 mm largement adapté au XC. Il en va de même de la tige de selle. Ici vous êtes en présence d’un modèle télescopique, la fameuse DT Swiss et son mécanisme inversé qui développe 60 mm de débattement, amplement suffisants en cross-country. L’avantage de ce modèle, c’est qu’il ne pèse rien : environ 400 g. Et puis, il y a pêle-mêle le passage des gaines et Durit© dans le capot de la direction, le blocage de la direction revu pour être plus léger mais toujours efficace, ou encore le serrage de tige de selle caché sous le tube supérieur (bon, là c’est joli, mais pas très pratique surtout de le serrer au bon couple), et enfin l’étrier de frein Flat Mount plus compact.

L’Exceed pour les amoureux du sport

Pour être précis, l’Exceed est un sportif intrinsèque qui s’articule autour de deux points essentiels. Primo des temps de réponse très courts à chaque coup de pédale, une sorte de prolongation de vos gestes à tout moment. Et ce Canyon ne manque pas de répondant. Et en second, les remontées d’informations qui renforcent le sentiment de communiquer avec la machine. Mais attention, pas toutes les informations, ou alors elles doivent être transformées pour que son pilote les comprennent bien. Et c’est le cas avec ce nouvel Exceed. On communie avec la machine sans la subir. Oui, vous avez bien lu, le nouveau venu peut se conduire à vitesse modérée sans qu’il vous détruise le dos, ou à pleine balle tout le temps sans avoir à le payer au bout de 25 km. Oublié l’inconfort, cette fois malgré des formes qui auraient pu prétendre le contraire, le Canyon est presque confortable. Et pas besoin d’aller jouer sur des pneus plus larges pour tricher, non, l’ensemble est cohérent. On ne vous dit pas que vous n’aurez pas de temps en temps des remontées du sol dans les chevilles (passage d’un obstacle qui ripe et reprise du grip derrière), mais le confort et la motricité sont au rendez-vous. Ok, le cadre est vivant, il sonne, et résonne, le clac de chaque changement de vitesse renvoie un bruit qui ne laissera aucune surprise sur vos intentions à vos coéquipiers, mais quel bonheur retrouvé ! Ce qui surprend le plus, c’est que plus le ton s’accélère, plus il semble épouser les vibrations aigües pour les transformer en graves, bien moins nocives pour le dos de son pilote. On se surprend même à débouler à pleine vitesse en descente, même techniques tant il encaisse de l’arrière. Bon, il faudra tout de même rester vigilant, parce que d’une part cela reste un semi-rigide, et d’autre part parce que le toucher des freins Sram, qui imposent une longue course morte, demande d’aller chercher très loin le point de contact avec les plaquettes. Bilan, on perd beaucoup de temps pour aller freiner, ce qui peut occasionner quelques frayeurs. La fourche n’est pas en reste puisqu’elle manque cruellement de précision quand cela commence à aller trop vite, ou de demander de tenir une trajectoire en appui. Heureusement, tout ça est complètement oublié lorsqu’il s’agit de rouler sur les longues lignes droites et faux plats montants. Le vélo roule tout seul. Ça paraît dingue dit comme ça mais son train roulant est d’une très grande qualité. Les roues Reynolds BlackLabel XC font partie intégrante de la réussite de ce vélo. Elles offrent une précision, une élégance lorsqu’il s’agit de rouler vite, surtout associées avec les pneus Maxxis, certes fragiles, mais au très bon rendement et au confort intéressant sur ce vélo. Une faute note cependant, le bruit de la roue libre finit par en lasser plus d’un. Que ce soient vos compagnons de route ou vous-même.

Pour autant, si le vélo a clairement du répondant, il n’est pour autant pas un foudre de guerre dans les enchaînements de virolos. L’arrière est même plutôt un peu à la traîne malgré ses bases coupées à 430 mm. Il faut plutôt mettre ça sur le compte de son triangle avant haut, et de ce boîtier de pédalier qui a été rehaussé. Il s avère alors qu’il y a deux techniques pour les passer sans perdre de vitesse : continuer de pédaler tout en gardant le doigt sur le frein arrière, voire baisser la selle en même temps (super rapide et efficace avec cette DT Swiss, même si elle prend du jeu), ou jeter la roue dans la courbe de sortie en tirant sur les jambes. Après, on peut comprendre puisque le choix a été mis sur la stabilité du vélo notamment en descente où il étonne par sa capacité à encaisser les chocs.

La légèreté, voilà la recette miracle de ce modèle

Grâce à son faible embonpoint, les côtes sont avalées, les obstacles survolés, et tout ça sans que vous n’ayez à le payer plus tard. Il se vit bien, on est loin de son prédécesseur qui imposait une condition physique au top pour le mener tout du long, et vous allez pouvoir faire autre chose que dormir l’après-midi d’une sortie dominicale. Si les côtes s’effacent aussi vite qu’elles ne se présentent, c’est surtout la motricité qui surprend. Le vélo grippe bien alors que son pneu n’est pas une référence en la matière. C’est la magie de la construction de son triangle arrière. En tout cas, il ne faudra pas oublier de se plaquer sur l’avant pour imposer à la roue avant de rester au sol. Autre point, il faudra bien s’avancer sur le bec de selle pour bien pousser sur les pédales. En effet, si la position du pédalier en roulant sur le plat peut satisfaire les grands rouleurs qui aiment avoir le pédalier un peu en avant de leur fessier, en revanche, sur un parcours parsemé de courtes grimpettes, un pédalier plus reculé n’aurait pas été de refus. 

Cette nouvelle mouture Exceed CFR est un bon compris entre rigidité, précision et confort. Certes il se mène plus à la baguette qu’un Lapierre, ou qu’un Yeti par exemple, mais il vous le rendra au double. Sa fourche manque de rigidité, dispose d’une hydraulique au minimum, et fonctionne essentiellement sur l’air, mais elle est légère, donc dans le programme. Ses roues sont une véritable dote pour qui voudrait la mariée. Le combo cintre-potence reste confortable, même s’il manque un peu de back sweep, mais c’est très personnel. Le seul problème c’est que l’on aurait aimé une potence plus courte, mais c’est impossible, sauf à tout changer. Enfin, si vous êtes entre deux tailles, privilégiez la taille inférieure. Donc pour le coup, la charte de Canyon sur ce modèle est absolument exacte.

Caractéristiques

GEOMETRIE : Taille : M – Tube supérieur : 595 mm – Tube de selle : 460 mm – Angle de direction : 68,7° – Angle de tube de selle (effectif) : 75,7° – Bases : 430 mm – Empattement total : 1125 mm – Hauteur de boîtier : 315 mm – Reach : 430 mm – Stack : 620 mm – FICHE TECHNIQUE : Tailles : XS, S, M, L, XL – Modèle d’essai : M – Cadre : carbone – Fourche : RockShox Sid SL Ultimate, offset 44 mm – Freins : Sram Level Ultimate , ø180/160mm – Dérailleur arrière : Sram XX1 Eagle Axs – Pédalier : Sram XX1 Eagle, 34 dents – Commande : Sram XX1 Eagle Axs – Cassette : Sram XX1 Eagle, 10-52 – Roues : Reynolds BlackLabel XC – Pneus : av. Maxxis Ikon Exo, 29 x 2.35” ; ar. Maxxis Aspen, 29 x 2.25” – Potence : Canyon CP08 Cockpit, 60 mm – Cintre : Canyon CP08 Cockpit, 760 mm – Tige de selle : Dt Swiss D232 One, ø 30,9 mm, 60 mm – Selle : Selle Italia SLR KC Boost.

Distributeur : Canyon France, Contact :www.canyon.com

Notes

Rendement : 5

Confort : 4

Maniabilité : 4

Stabilité : 4,5

Prix/Equipement : 4,5

TOTAL : 17,6/20

On aime : Vive le léger ! • Le confort est de retour • Le dynamisme du train roulant

On regrette : Le combo cintre/potence limite les réglages possibles • Bruit fatigant de la roue libre • Un léger manque de fun • La fourche manque de rigidité