Sportif de l’extrême, aventurier dans l’me, Hans Rey est aussi un homme de cœur. Pour cette nouvelle aventure, il nous emmène en Tanzanie, au pied du Kilimandjaro où, après une virée à VTT de 220 km, il a rejoint la vallée d’Ugweno pour mener à bien un projet cinématographique sur l’action de son association «Wheels 4 life».
Avec ce documentaire, nous voulons montrer comment la fourniture de vélos peut modifier favorablement la vie des populations du Tiers-monde en favorisant le transport des marchandises qui seront échangées sur le marché voisin et en favorisant le déplacement des hommes et des élèves qui doivent parcourir plusieurs kilomètres à pied pour se rendre sur leur lieu de travail ou à l’école. Sachant qu’un bon vélo coûte entre 100 et 180 $ en Tanzanie, je peux vous garantir qu’il n’y a pas une seule famille qui possède une telle machine dans la vallée d’Ugweno… C’était donc l’endroit idéal pour débuter notre documentaire et filmer, sur plusieurs mois, l’évolution de la vie quotidienne des populations de la vallée, située à quelques kilomètres de la frontière kenyane.
Cette incertitude m’a contraint à louer les services d’un guide, d’un cuisinier et d’un chauffeur qui devaient nous rejoindre chaque soir au campement. Pour mener à bien cette première partie de l’aventure et pour fêter dignement le 20e anniversaire du Zaskar de GT, je décidai de rouler sur un Zaskar carbone rigide équipé de pédales plates Rasta. En récupérant mes bagages à l’aéroport international de Kilimandjaro, je m’étais rendu compte que mes chaussures de vélo étaient restées en Angleterre… De son côté, Carmen choisit un modèle marathon alors que Rob opta pour son freeride.
Le lendemain, nous quittons la ville d’Arusha, où se trouve l’aéroport, pour rejoindre le territoire Masaï. Le sol est sec et aride, le relief vallonné. A notre gauche se trouve le mont Meru qui culmine à 4 566m d’altitude alors que sur notre droite se dresse, la tête dans les nuages, le Kilimandjaro. De temps à autre, nous traversons des petits villages composés essentiellement de petites huttes en terre. Contrairement aux populations qui vivent à l’Est du pays, les Masaï sont un peuple de mendiants. Ils se jettent littéralement sur nous pour demander de l’argent. Plus tard dans l’après-midi, nous atteignons le village d’Ol Molog où l’équipe d’accompagnement a déjà installé le campement dans le préau d’une l’école. Il n’est pas très tard mais l’absence de luminosité nous pousse à aller nous coucher tôt. Il faut dire que dans la région, les villages reculés ne disposent ni d’électricité, ni d’eau courante.
Contrairement à ce que nous avait dit le guide, l’itinéraire est loin d’être plat
Après une bonne nuit de sommeil, nous poursuivons notre route sur la face nord du Kilimandjaro, en bordure de la frontière kenyane. Contrairement à ce que nous avait indiqué le guide, l’itinéraire est loin d’être plat. Malgré son manque de bagage technique, Carmen se débrouille très bien ! En milieu d’après-midi, elle nous annonce qu’elle a froid et qu’elle a la chair de poule alors qu’il fait plus de 40°… Il nous faut absolument l’encourager pour qu’elle continue jusqu’au prochain campement, où elle pourra se reposer. Après une bonne nuit de sommeil, elle est de nouveau partante. Plus nous avançons et plus la végétation est dense et luxuriante. On commence à apercevoir de grandes plantations de bananes. Les villages traversés semblent être peuplés essentiellement d’enfants… Il faut savoir que cette région est fortement touchée par l’épidémie de sida et que 90% des enfants sont orphelins. Heureusement que les plus grands prennent soin des plus jeunes… Carmen apporte un peu de douceur à leur vie en distribuant des bonbons. Le soir, nous retrouvons nos guides et cuisiniers dans un camp à l’extérieur de la ville de Mangaru. C’est notre dernière nuit avant de rejoindre Elvida à Kivisini.
Pour cette dernière journée de VTT, nous souffrons beaucoup de la chaleur. Le thermomètre de Bob annonce plus de 50° C. Heureusement que le parcours est essentiellement descendant. J’ai adoré cette ultime partie de l’itinéraire mais c’est avec plaisir que j’ai rejoint Elvida et le pasteur de la vallée d’Ugweno pour la seconde partie de l’aventure. Dans cette contrée reculée, les villageois partagent leur demeure avec les poulets et les poules. Ici, il n’y a ni eau, ni électricité. Pour se ravitailler en eau, ils doivent bien souvent marcher sur plusieurs kilomètres afin de se rendre jusqu’à la pompe commune. Tous les 15 km, on trouve des petites échopes où il est possible d’acheter les produits de nécessité courante (Coca-Cola compris !). Pour l’essentiel de leur alimentation, les villageois cultivent de petits lopins de terre juste devant leur case. Les seules infrastructures « publiques » de la région sont le dispensaire, l’école primaire, située à une vingtaine de kilomètres de Kivisini, et parfois un collège. La plupart des adolescents arrêtent l’école à 14 ans car leurs familles n’ont pas les moyens de payer les frais de scolarité et qu’il n’y a pas de transport scolaire pour les emmener au lycée. Autant dire que l’arrivée d’un vélo dans une famille représente un investissement comparable à l’achat d’une voiture dans nos sociétés…
Pour cette première visite, nous avons prévu de distribuer 42 vélos dans l’ensemble de la vallée d’Ugweno. Pour découvrir la région, nous suivons le pasteur Baraka qui nous introduit dans les différentes communautés, expliquant aux populations notre mission et l’objectif du film. Il nous faut ensuite « sélectionner » les personnes qui recevront un vélo. Le choix est difficile et il ne faut en aucun cas créer un sentiment de jalousie au sein des différents villages. Nous décidons donc d’en laisser une partie au centre. Ces vélos pourront être utilisés par l’ensemble de la communauté en échange d’un petit prix de location ou d’un service. Les vélos que nous livrons sont, pour 20 d’entre eux, de la marque Phoenix. Un produit kenyan dont le montage révèle bien des surprises avec des pièces mal ajustées qui obligent à quelques opérations de tuning parfois délicates… Heureusement que l’un des employés du vélociste kenyan est là pour nous aider ! Les autres vélos arrivent directement de Californie. Ils ont été offerts par nos amis de la Bicycle Empowerment Network et de l’Institute for transportation and development policy et spécialement conçus pour l’Afrique avec 6 vitesses, un porte-bagage, un système de freinage fiable et des couleurs gaies. Ils sont magnifiques mais deux fois plus chers que les Phoenix. Voilà, il est temps pour nous de rentrer mais nous reviendrons prochainement pour évaluer l’impact de l’arrivée des vélos sur la vie de la communauté…