Specialized Chisel Comp : Quelle fougue !

Specialized a décidé de renouveler complètement son offre de vélos sur le segment des VTT de rando-sportive, voire d’accès à la compétition. Et c’est le Chisel qui s’y colle, et autant vous le dire tout de suite, d’une bien belle manière !

DR. N. Le Carré

[Htab][tab title=”PRIX”]1499€[/tab][tab title=”POIDS”]11.60 kg sans pédales en taille M[/tab][tab title=”DEBATTEMENT”]Déb. av. : 100 mm | Déb. ar. : – mm[/tab][tab title=”USAGE”]Compétition, rando-sport, vallonné, plaine.[/tab][/Htab]

On ne va pas vous refaire l’article sur le Chisel, vous avez tout lu sur ce nouveau modèle dans la présentation que nous vous avions faite le mois dernier dans Vélo Tout Terrain (N°223). Retenez qu’il s’agit pour la marque américaine Specialized de proposer un remplaçant à celui qui fut nommé Carve puis Crave. Un modèle d’autant plus clé dans la gamme qu’il représente un point d’accès dans la cour de grands, celle des VTT qui ouvrent les portes de la compétition. Gardez aussi à l’esprit que pour réussir cette transition, l’approche stylistique du cadre a été complètement repensée pour vous offrir un produit aux odeurs de haut de gamme. Regardez-le, difficile de voir qu’il s’agit d’un “simple” cadre en aluminium. Au mieux, la finesse des tubes arrière peut évoquer un trait caractéristique d’un cadre en acier, à l’avant, un rapide regard et vous avez l’impression d’être en présence d’un carbone, tant les soudures sont propres et justement proportionnées. Il faut dire que les ingénieurs ont adopté une nouvelle technique de mise en production du triangle avant au niveau de sa douille de direction. Cela passe par des tubes en alu qui permettent de maximiser les surfaces de contact pour la soudure, tout en en réduisant leur masse. Cette solution nommée Smartweld Technology, met en forme l’extrémité du tube en aluminium M5 afin qu’il épouse littéralement la surface opposée qui est préformée à recevoir cette forme du tube, ce qui permet d’optimiser la surface de contact et donc de réduire l’ajout de matière lors de la soudure. On obtient ainsi un meilleur contact et cela permet au passage de gagner du poids sur le cadre. Ainsi, c’est 50 g de moins par rapport à un cadre à tubes classiques. Specialized annonce le cadre du Chisel a seulement 1 350 g, ce qui est très honnête à ce niveau de gamme, et qui permet de proposer une version complète à 11,6 kg en taille M sans pédale, mais en montage tubeless et avec un porte-bidon.

On passe rapidement en revue le reste des choix techniques. La tige de selle en ø27,2 mm est là pour offrir plus de confort avec une meilleure filtration des chocs, bien aidée par le triangle arrière aux haubans fins. Accessoirement le cadre est prévu pour recevoir une tige de selle télescopique, tandis que le reste des gaines profite d’un passage interne pour donner des lignes très fluides au vélo. Notez que Specialized revient vers les boîtiers de pédalier filetés, échaudé par les désillusion des boîtiers PressFit qui imposent de les détruire à chaque fois que vous voulez les retirer. C’est donc une bonne nouvelle pour nos porte-feuilles. Enfin, le cadre adopte le Boost148 à l’arrière pour permettre d’avoir des roues 29” avec un meilleur parapluie, et réduire au passage la longueur de bases.

Une identité signée Spe’

Depuis des années Specialized a défini le comportement que doit avoir un VTT qui sort de ses usines, une véritable carte d’identité qui passe par deux points forts : des bases courtes et un boîtier de pédalier bas. Le Chisel ne fait pas exception. Ainsi ce 29” s’offre des bases coupées à 430 mm quand sa boîte de pédalier se pose à 318 mm du sol avec ses pneus Specialized Fast Trak différenciés avant/arrière en largeur (2.3” à l’avant et 2.1” à l’arrière). Pour autant, pas question de répondre à la nouvelle tendance qui tend à allonger le tube supérieur. Notre modèle en taille M affiche seulement 585 mm associés avec une longue potence de 90 mm… Un choix qui peut surprendre aujourd’hui mais qui s’explique par l’utilisateur visé par la marque, le randonneur sportif et le compétiteur qui ne veulent pas se battre avec leur machine mais se consacrer seulement au plaisir de rouler. Pour autant, la marque continue à équiper son vélo avec une tige de selle au recul prononcé pour permettre à chaque taille de cadre de pouvoir recevoir un large spectre de taille d’utilisateur. En l’occurrence pour un pilote d’1,70 m, il est important de passer sur une potence de 70 mm et d’avancer la selle comme si nous étions sur une tige de selle droite. Dans ce cas, pourquoi ne devrait-il pas prendre la taille inférieure ? Pour le coup, le cadre serait trop petit…

Si son point fort c’est d’abord son look, son comportement sur le terrain ne tarde pas à mettre le Chisel sur une autre dimension. Si vous voulez passer un moment sympathique à chaque fois que vous mettez votre séant sur la selle d’un VTT, alors ce VTT est pour vous ! Certes, il ne sera pas exempt de petits défauts avec lesquels il faudra faire. C’est le cas, non pas de la fourche RockShox Judy dans son ensemble, mais seulement de l’impossibilité de lui adjoindre des cales dans la chambre d’air afin de rendre plus progressif le ressort à air, histoire de contrecarrer l’absence de compression haute vitesse qui vous fait aller en fond de débattement à chaque rencontre avec un obstacle un peu plus gros que l’accoutumée. Certes nous aurions pu mettre plus de précontrainte (nous avons opté pour 95 psi pour un pilote de 78 kg équipé), mais dans ce cas nous aurions perdu la sensibilité sur les petits chocs. Finalement, nous avons préféré jouer sur la “compression basse vitesse”, qui va jusqu’au blocage, pour durcir la fourche dans les passages techniques rapides et limiter sa mise en butée.

Niveau confort, nous n’allons pas vous le cacher, nous nous attendions à mieux. Peut-être est-ce dû au physique mince de son triangle arrière qui n est pas sans rappeler un triangle acier, donc souvent délicat avec le fessier. Non, ici on est bien sur de l’alu, qui raisonne malgré la tige de selle que l’on sent plier sous ses fesses, mais rassurez-vous, on peut facilement envisager les 50 bornes à son guidon sans passer chez l’ostéopathe derrière. Il faudra juste envisager un bon massage décontractant du haut du corps, et des cuisses. Car rouler avec le Chisel, c’est prendre le risque de ne jamais rouler en ligne droite tant on a envie de jouer tout le temps avec son environnement.

Aller loin, avec élégance, et amusement

DR. N. Le Carré

Le Spe’ dévale les pentes goulument, se jette d’un virage à l’autre et en ressort comme une balle, ou presque. En pompant, on peut même s’abstenir de coups de pédales entre les tournants tant le Chisel roule tout seul. Dans les descentes, le vélo paraît léger entre les jambes et du coup, on saute littéralement d’une trajectoire à l’autre, profitant de la stabilité de l’avant mais avec la vivacité de l’arrière. Ici l’agilité n’est pas de façade, elle se vit sur le terrain. Une fois bien plaqué dans la courbe rapide, impossible de l’en déloger. On se sent en confiance. Plusieurs raisons à ça. La première, la boîte de pédalier qui est basse, véritable signature de l’Américain, et qui permet d’abaisser le centre de gravité. La seconde, la fourche. Ok, l’hydraulique de la cartouche est loin d’être de haut vol, et la fourche tend à s’enfoncer dans son débattement à la moindre sollicitation du terrain ou sur des gros freinages, mais question rigidité, elle est loin de faire semblant. Malgré ses plongeurs au diamètre d’un autre temps, l’apport du moyeu Boost associé à de larges contacts avec les pattes de la fourche font vraiment miracle. Enfin, reste le train roulant. Pour le coup, la souplesse de roues associée au profil des pneus Fast Trak permet au vélo d’avoir une tenue de route qui lit le terrain. Pas de coup de raquette, juste au pire, une glisse progressive. Dans ces conditions, on n’a pas besoin de se battre à son guidon, mais plutôt d’avoir la banane. Et dans les virolos lents ? On place facilement la roue avant et le boîtier bas n’est pas forcément un handicap. Certes il faut l’inscrire avec autorité dans la courbe, mais passé un point la direction devient plus souple et il faut même veiller à ne pas trop se diriger dans le centre du virage. L’arrière ? Il tourne tout seul, suivant comme un fidèle compagnon les injonctions du pilote.

Le Spe’ dévale les pentes goulûment, se jette d’un virage à l’autre et en ressort comme une balle, ou presque.

La gestion des changements de vitesse a fait des progrès par rapport à l’ancienne manette Shimano Deore. On sent bien la différence de réactivité. On regrette seulement le choix de Specialized quant aux doubles plateaux. Non pas le fait qu’un mono-plateau aurait tout à fait sa place sur ce vélo, d’ailleurs il semble qu’une version mono arrive, mais plus dans le choix des dentures. Dans une côte par exemple, on passe ainsi du 36 au 22 dents à l’avant, ce qui fait un gros gap, et qui impose de descendre trois pignons à l’arrière, contre deux généralement, lors du changement du grand vers le petit plateau. Sans ça, c’est moulinette assurée et perte du rythme de pédalage. Heureusement que le Chisel est tolérant en côte. On monte au train, en se permettant même de se mettre en danseuse ici ou là. Attention quand même à ne pas en abuser car avec ses bases courtes la perte de motricité n’est pas loin, surtout que le Fast Trak ne sont pas les pneus les plus cramponnés de la gamme. Heureusement, bien calé en selle, nous avons été impressionnés par sa stabilité, mais dans les gros raidards. En tout état de cause, la relance est facile, la boîte de pédalier n’est pas trop verrouillée et les manivelles supportent bien la charge. On dénombre pas ou peu de léchage de fourchette de dérailleur avant. C’est plutôt bon signe d’autant que l’on a pas besoin de le relancer pour maintenir sa vitesse.

Avec ce nouvel opus, Specialized montre qu’il est toujours capable de proposer des produits aboutis capables d’emmener loin son pilote avec élégance, et amusement. Il reste néanmoins que la concurrence à ce niveau de prix est très forte et que certains détails peuvent déplaire (gestion hydraulique de la fourche, choix surprenant d’un 36/22, potence trop longue) au moment de l’achat. Gageons que l’esthétique, surtout dans cette version bleu lagon fera pencher la balance dans son sens au moment de l’achat.

Caractéristiques

FICHE TECHNIQUE : Tailles : S, M, L, XL – Modèle d’essai : M – Cadre : alu M5 – Fourche : RockShox Judy 29 – Freins : Shimano Deore, ø160/160 mm – Dérailleur avant : Shimano Deore – Dérailleur arrière : Shimano XT, 11vit. – Pédalier : Stout, 36/22 dts – Commandes : Shimano Deore – Cassette : Shimano Deore, 11/36 – Roues : Specialized Alloy29/Stout Boost – Pneus : Specialized Fast Trak Gripton, av : 29×2.3”- ar : 29×2.1” – Potence : Specialized Alu, 95 mm – Cintre : Specialized alu mini-rise, 720 mm – Tige de selle : Specialized alu, ø27,2 mm – Selle : Specialized Phenom Comp – GEOMETRIE taille M : Tube supérieur : 585 mm – Tube de selle : 430 mm – Angle de direction : 69,5° – Angle de tube de selle : 74° – Bases : 430 mm – Empattement total : 1105 mm – Hauteur de boîtier : 318 mm – Reach : 420 mm – Stack : 605 mm.

Distributeur : Specialized France, Contact : www.specialized.com

RENDEMENT [star rating=”4″]
CONFORT [star rating=”3″]
MANIABILITE [star rating=”3.5″]
STABILITE [star rating=”3.5″]
PRIX/EQUIPEMENT [star rating=”3.5″]

[quote] On aime : Quelle gueule ! • Géométrie • Sentiment de facilité dans les difficultés
On regrette : Potence longue • Selle fragile • Pneus très spécifiques • Fourche manquant d’hydraulique.[/quote]