Scapin Oraklo S3 : Italien dans la fibre

Il arrive presque un an après son lancement sur le marché. Lui, c’est l’Oraklo de chez Scapin, le crosseur à la sauce italienne. Ici présenté dans l’une des six versions que propose le constructeur italien, le S3 dévoile une vision transalpine du 29 pouces.

Soucis du détail

On note au passage le collier de serrage double. Toujours sur le châssis, on aime l’intégration des câbles guidés dans le tube diagonal. Inutile de passer un liner avant de les ôter, les nouveaux trouveront seuls la sortie. En revanche, plus singulier, la fin du cheminement vers le dérailleur arrière cumule guide et gaine quand une simple butée aurait pu faire repartir directement et bien abrité le câble dans sa gaine. De l’autre côté du dérailleur arrière, on trouve l’étrier de frein placé sur la base fixé selon le standard Post Mount pour un disque de ø 160 mm minimum. Des inserts en aluminium amovibles servent d’écrou. Dans les petites finitions, on regrette l’absence de protection en cas de déraillement de la chaîne autour de la zone du boîtier qui sera forcément rayée par la chaîne. Idem pour la partie inférieure du tube diagonale pas même revêtue d’un film de protection translucide pour éviter les petits impacts. A rajouter absolument.

Dernier point sur le cadre : les 1 398 g de son poids en taille L le placent loin de ce qu’il se fait de mieux, mais le situent dans la moyenne. Pour ce qui est de la géométrie, exceptée une douille de direction très droite à 72° qui prédit une direction vive, RAS, on est dans la moyenne des valeurs constatées en 29er. L’équipement est de très bon niveau mais compte tenu du prix, c’est un minimum. On aime la transmission 2×10 adaptée au 29er, mais on s’empressera de remplacer la potence particulièrement longue et inclinée vers le bas. On regrette déjà la fourche en axe de 9 mm qui risque de ne pas convenir à ce format de roues qui plus est, quand ce sont des No Tubes ZTR Crest en 32 rayons qui ne se distinguent pas par une rigidité latérale importante. On aurait préféré disposer d’une fourche RockShox Reba en axe traversant de 15 mm, d’autant que le moyeu Miche le permet en ôtant des inserts. En pur crosseur, il est équipé des Grip Shift heureusement complétés des freins Avid, les plus compatibles sur le plan ergonomique. Le cintre en 660 mm est un soupçon étroit pour du 29er, mais comme de toute manière la potence n’est pas vraiment propice à donner le meilleur en matière de pilotage non plus… Voyons ce qu’il en est sur le terrain.

Sur le terrain

En effet, d’emblée la position très orientée vers l’avant et le bas dérange dès lors qu’il s’agit de descendre une section raide. On perd l’effet rassurant du 29 pouces. Elle sera rapidement remplacée par un modèle donnant plus d’équilibre à la position. En revanche, la position est parfaite dès lors qu’il s’agit de pédaler assis. La longueur du tube supérieur et l’angle du tube de selle prolongé par une tige sans déport favorisent la transmission de l’énergie et de la puissance, notamment dans les côtes. Ceux qui préfèrent être plus allongés pour les portions plates notamment, n’auront qu’à reculer la selle, voire passer sur un chariot déporté de 15 ou 25 mm vers l’arrière si besoin. Mais pour ce qui est d’une pratique VTT dans un relief accidenté, c’est parfait. Dans les relances, le rendement laisse apparaître la souplesse des roues qui ne donnent pas tout le dynamisme que l’on pourrait espérer. Pourtant très correctes en poids avec 1 676 g la paire, c’est plus lorsque l’on pédale assis que l’Oraklo fait remonter le curseur sur l’échelle « performance ». Avec sa transmission adaptée et son petit plateau en 24 dents, couplé à des pneus Schwalbe Rocket Ron parfaits en accroche et motricité (un peu moins en roulement pur) et une bonne stabilité à basse vitesse, il offre d’excellentes prestations dans tous les types d’ascensions, surtout si on reste sur la selle. Une selle Fizik Tundra 2 qui permet de glisser sur l’avant grâce à son bec plat et large qui reste confortable dans les coups de cul les plus raides. On rappelle que le Push-Lock (la manette de blocage de la suspension avant) vient parfaire un comportement dynamique approprié au terrain, mais cette fonction peut aussi être déviée de son utilisation première grâce à son Motion Control. En effet, cette petite molette dorée qui gère le seuil de déclenchement de la fourche lorsqu’elle est bloquée peut apporter une consistance plus importante en descente pour ceux qui trouveraient que l’avant plonge un peut trop (surtout avec le poste de pilotage d’origine) sans pour autant la gaver d’air. Autant de paramètres que les plus aguerris en matière de réglages aiment à manipuler à leur guise.

Dès lors que la pente s’inverse, on est confronté à un seul et unique problème malgré un angle de direction propice à une direction vive et précise. L’absence de rigidité de la roue avant et de la liaison fourche/roue enlève trop de précision et de maniabilité dès qu’on se trouve dans des sections lentes sinueuses et techniques. C’est véritablement le seul regret (après avoir remplacé le poste de pilotage par une potence plus courte et moins plongeante et un cintre en 700 mm). En revanche, lâcher les freins sur des sentiers propres et rapides se fait en toute confiance. On aime le freinage efficace et modulable tout autant que l’accroche des pneus. On aime aussi, paradoxe des caractéristiques d’un produit, la souplesse que les roues apportent dans les courbes, les dévers et les passages de racines. ça donne à l’ensemble un comportement plus sain et tolérant à l’erreur.

Un pur crosseur

Comme souvent, si on prend la peine de baisser quelque peu la selle, on se trouve face à un potentiel accru et des conditions plus à même de profiter à la fois de sa monture et de la descente. ça c’est pour les randonnées tranquilles et les sorties entre potes où il est d’ailleurs préférable de remplacer le double blocage à vis par un collier de serrage rapide et un repère pour la hauteur. Evidemment, pour une utilisation en compétition, ce à quoi il se destine tout aussi naturellement, pas question de ça ! On rappelle qu’avec les jantes No tubes ZTR pourvues d’un fond de jante étanche et les carcasses tubeless ready, il suffit de mettre des valves et du produit préventif pour passer le train roulant en « sans chambre ».Avec ce Scapin, nous avons affaire à un pur crosseur dont la nature est largement forcée par un poste de pilotage un poil trop orienté race. Le train roulant est bien adapté à ce cadree, même si la tonicité globale n’est pas maximale, mais de grâce, faites monter une fourche avec axe de 15 mm, vous obtiendrez ainsi une machine vive et efficace avec laquelle il sera largement possible de se faire plaisir, le style italien en plus.