Ressuscité
12 999 € | 21,8 kg* taille M (*en carcasse Maxxis DD)
Déb. av. 160 mm | Déb. ar. 150 mm
Pratique : randuro, enduro / vallonné et montagne
Avec ce nouvel opus de l’Heckler, Santa Cruz donne enfin une dimension de voyageur infatigable à son vélo polyvalent. Il peut remercier sa nouvelle batterie de 726 Wh, son poids contenu, mais aussi sa géométrie passe-partout qui fait mouche en 29’’. Aussi proposé en MX, il ravira sûrement les plus fougueux des pilotes.
Texte : Benjamin Lacoste / Photos : B.L. & Max Schumann
L’histoire débute au coin d’un feu. Nous sommes fin janvier, au Gite de la Chapelle Saint Gervais à la sortie de Sospel (06). La température est clémente pour la saison, surtout quand on débarque du nord de la Loire où la pluie et le froid règnent en maître depuis des mois. Autour du feu, Danny MacAskill, célèbre trialiste freerider qui cumule des millions de vues sur ses vidéos Youtube, nous parle de la révolution qu’a été le VTTAE dans sa vie. Ses yeux pétillent lorsque qu’il nous parle de son vélo, son visage d’enfant, malgré sa trentaine bien passée, s’illumine quand il décrit son Heckler.
Et pourtant on ne peut pas dire que ce modèle soit né sous les meilleures étoiles. Il faut remonter presque deux ans en arrière lorsque durant l’été, Santa Cruz dévoile son premier bébé à assistance électrique. Autant vous dire qu’il était très attendu. Oui mais voilà, entre le besoin de le mettre sur le marché, et les problèmes techniques de Shimano lors du lancement de son moteur EP8, les ingénieurs ont dû faire des compromis. Le voilà lancé avec le petit moteur E7000 alors que tout le monde attendait l’EP8 censé sortir au même moment. Sa batterie ? Une Shimano standard de 500 Wh. Face à la concurrence qui commençait déjà à sortir la grosse artillerie, l’Heckler ne faisait pas le poids. Déjà en retard à son lancement. Bien sûr, il y a eu des évolutions avec enfin l’arrivée du Shimano EP8 qui a naturellement trouvé sa place sur le cadre (les points de fixation sont les mêmes que l’E7000), puis l’option du montage en roues différenciées (29’’ à l’avant et 27.5’’) quand le montage d’origine est en 27.5’’, mais finalement rien qui n’a pu faire oublier ce lancement raté. Mais heureusement, nous voilà en 2022 et quand Danny nous parle de son Heckler, ce n’est pas à celui de 2020 qu’il fait référence mais à celui que nous allons pouvoir découvrir et rouler sur les sentiers autour de Sospel, et désormais il a de sacrés arguments à faire valoir.
Dans l’air du temps
Si extérieurement on a du mal à vraiment faire la différence entre l’ancien et le nouvel Heckler, en y regardant à deux fois, on comprend vite qu’il n’a plus rien à voir. D’abord il a été développé non pas autour d’une seule plateforme mais de deux. En effet, l’Heckler est disponible en roues de 29’’, et en montage MX/mulet. Leur seul point commun, le triangle avant, l’arrière est propre à chaque format de roue. La raison est simple : pas de concession ! Et c’est Todd Ford, chef de produit sur l’Heckler, qui en parle le mieux : « Nous avons testé les deux formats de roues, et nous n’avons pas réussi à les départager, chacun ayant ses avantages et ses défauts. Donc nous avons décidé de proposer les deux ! » Quel luxe de pouvoir faire ce choix. Ça veut aussi dire que vous ne pourrez pas revenir en arrière une fois que vous aurez fait votre choix. A moins de dégotter un bras arrière et la biellette inférieure spécifique… Bon courage ! Puisque l’on parle du cadre, il est évidemment en carbone, pas de changement de ce côté dans la manière de le mettre en forme. Il sera cependant proposé en deux versions et non plus une seule comme sur le précédent. Vous trouverez donc de la fibre plus “classique” sur les quatre premiers modèles, et seul le haut de gamme sera en fibre plus travaillée. La différence en terme de poids n’est pas si importante. Ainsi le cadre carbon CC est annoncé pour 3 103 g en montage MX et taille L (3 140 g en 29’’) contre 3 432 g pour la version carbon C en MX, toujours en L (3 515 g en 29’’).
Côté débattements, les ingénieurs n’ont pas répondu aux sirènes de l’inflation, juste 10 mm de plus : 160 mm à l’avant et 150 mm à l’arrière. De quoi confirmer l’Heckler dans sa vocation polyvalente, à l’image du Nomad dans la gamme classique, et de bien laisser au Bullit la charge de représenter le gros enduro dans l’équipe. C’est pourquoi on ne retrouve pas une géométrie trop agressive, mais plus consensuelle qui lui va très bien. Ce qu’il faut retenir, c’est que si l’angle de direction ne bouge quasiment pas, le tube de selle se redresse de près de 2°, que les bases s’allongent à 460 mm pour redonner de la stabilité, et que le triangle avant adopte enfin une vraie bonne longueur de reach. Ainsi sur un taille M, il gagne presque 2 cm. Pour les amoureux des réglages, vous pourrez jouer avec le petit FlipChip pour ajuster non pas la géo puisque l’influence à ce niveau est quasi nulle, mais par contre il jouera sur la courbe de compression de l’amortisseur avec beaucoup plus de soutien à mi-parcours et une arrivée très tardive en fin de course. Ah, pour ceux qui auraient aimé que Santa propose une longueur de base différenciée en fonction de la taille de cadre, les ingénieurs y ont répondu par la négative. Ils le justifient par l’agencement des points de pivot au niveau de la suspension qui est différent d’une taille à l’autre, d’abord pour conserver la même expérience terrain au niveau de la suspat’ que vous soyez grand ou petit, mais aussi parce que cela aura une influence sur la trajectoire de la roue arrière et compensera la longueur de base commune. Côté motorisation, pas de surprise, Santa Cruz reste fidèle à Shimano avec son moteur EP8. Par contre pour la batterie, qui est extractible avec une simple clé Allen de 4 mm, vu que le Nippon tarde à livrer sa batterie de plus grosse capacité (630 Wh), les ingénieurs ont choisi Darfon pour leur fournir l’énergie. Et ça tombe bien parce que cette marque est dans la liste des produits conformes pour l’usage d’un moteur Shimano, et mieux, le SAV sur la batterie peut être assuré par Shimano France ! Autre avantage de cette batterie, elle dispose de 726 Wh pour un poids très proche de la batterie Shimano (3,75 kg contre 3,6 kg) tout en étant assez compacte. Pour preuve, elle est 2,5 cm plus courte que la Shimano, et juste 0,5 cm plus large. L’Heckler y gagne sur tous les tableaux.
Plus polyvalent que jamais
Pour ces deux jours de roulage, nous disposions de la version la plus haut de gamme, dont le prix culmine à plus de 12 000 €. Certes, le vélo est au top de l’équipement, avec même des petits plus comme les roues Reserve à la rigidité différenciée entre l’avant qui est une jante “classique” et l’arrière que l’on retrouve généralement sur les roues de vélos de descente de la marque. Mais il faut prendre en compte que la gamme se compose de quatre autres modèles à partir de 7 999 € (transmission Sram NX/ RockShox Lyrik Select). Et que selon nous, la version la plus intéressante en rapport équipement-prix sera du côté de la version S en Sram GX/ Fox 36 Performance pour la somme de 8 999 €. Et sur le terrain alors ?
Le temps de charger les suspensions en air, et le vélo est prêt. Les recommandations du constructeur se basent sur 30 % de précontrainte à l’arrière et à peu près pareil à l’avant. Il faut noter que la fourche comme l’amortisseur sont particulièrement chargés en cales volumétriques. On en compte deux à chaque extrémité. En discutant avec un ingénieur, on apprend que l’Heckler peut désormais recevoir un amortisseur à ressort hélicoïdal. La cinématique le prévoit, et le tunnel sur le tube de selle est maintenant suffisamment large pour passer le ressort. Bon à savoir. En tout cas, pour notre poids de 75 kilos, nous sommes partis sur une base de 70 Psi à l’avant et 200 Psi à l’arrière. On profite des premiers kilomètres de mise en jambe vers la Croix de la Réoune pour appréhender le vélo. Une bonne grimpette, qui met en avant les réglages de base de l’assistance très tournés vers l’économie. Un passage par l’application E-Tube de Shimano, et nous définissons un profil avec un peu plus de soutien ! On profite également de cette grimpette parsemée de marches et de pierres fuyantes pour apprécier la motricité à la roue arrière, à condition de ne pas charger en compression basse vitesse. Un clic, pas plus. Au-delà, non seulement vous allez à l’encontre de la cinématique mais en plus vous perdrez la motricité salvatrice dans ces grimpettes techniques. La roue arrière de 29’’ semble voler sur les obstacles, les enrouler sans buter. La position avancée du tube de selle est parfaite pour pédaler en montée. On pédale en puissance sans devoir se mettre sur le bec de selle. A l’avant, c’est une autre histoire. La fourche bute contre les rochers, alors que toutes les compressions sont ouvertes. Il faut vraiment anticiper, en soulageant l’avant pour passer les obstacles. Une technique à adopter d’autant que l’arrière a parfois tendance à pousser vers l’avant. Le vélo demande alors de bien s’équilibrer pour ne pas voir l’avant se lever au ciel. La petit boucle de réglage de l’engin tourne vers les pentes négatives. Le sentier est assez fermé, mais déjà l’Heckler surprend par sa vivacité malgré ses grandes roues et surtout son long train arrière. Le train roulant est collé au sol, et déjà l’Heckler oblige à reconsidérer vos repères de freinage tant il arrive vite sur les obstacles. Il met aussi en évidence un comportement que l’on n’aura de cesse d’apprécier durant ces deux jours, c’est sa capacité à rester assez haut en suspension dans le cassant. Le vélo ne plie pas, et reste parfaitement équilibré dans la pente. L’avant ne plonge pas, et l’arrière n’arrive jamais en fin de course. Alors cela impose d’avoir des épaules bien musclées pour ne pas subir le vélo. D’autant que l’on sent bien que la rigidité est au rendrez-vous.
L’Heckler encaisse les kilomètres sans broncher
C’est l’arrivée au cœur de la ville de Sospel pour ajuster nos réglages, et nous reprenons notre route vers le versant opposé, resté dans l’ombre de la matinée. La montée se fait au début sur une piste 4×4 qui dévoile le tempérament rouleur du vélo. Parfaitement calé sur la selle positionnée pour la première fois depuis longtemps au centre de la tige de selle, l’Heckler encaisse les kilomètres sans broncher, ni même jouer du yoyo de la suspension arrière. Le confort est pourtant au rendez-vous. D’une piste de sable tassé, nous voilà sur des pierres roulantes. Encore une fois, la motricité est là et même s’il faut se battre un peu avec l’avant fuyant, nous sommes impressionnés par la facilité que l’on a à placer le vélo dans ces passages techniques. Un petit aparté pour évoquer le dérailleur AXS de Sram. C’est définitivement le meilleur dérailleur sur un électrique : rigide, solide, il encaisse sans broncher les passages de vitesses à pleine charge et cerise sur le gâteau, malgré deux jours à rencontrer quelques rochers, il a toujours fait un travail de qualité. On en connaît plus d’un qui aurait rendu les armes. On s’engage dans la descente pour revenir sur nos pas, mais ce côté ombragé du Mont Diaurus ne permet pas de profiter des épingles serrées, dans un sentier constitué de pavés rendus glissants faute de voir le soleil. La descente est périlleuse et même en laissant vivre le vélo, l’Heckler n’est pas à son aise. Nous non plus.
Il encaisse comme une vélo de descente
Passage obligé par la route pour atteindre la Cime du Bosc qui culmine à 1 123 m. Un peu plus de 800 m de dénivelé positif en quelques kilomètres. En mode trail, presque deux barres vont y passer, mais pas une once de fatigue malgré la cadence à 85 tr/mn constante. Si vous êtes dans la région, ce sommet s’impose par l’étendue de la vue, et par les descentes qui s’ensuivent. Le vélo est facile de l’avant malgré l’ajout de poids de la batterie sur la partie haute du vélo. Il reste assez facile à piloter, avec une direction qui s’inscrit très facilement dans les virages et ne vous emporte pas vers l’extérieur. La suspension est assez réactive sur les petits chocs successifs, mais le plus intéressant c’est qu’à mi-course, il y a un gros support : le vélo se tient très bien et il est alors très facile dans les virages en gros appuis. Plus ça va vite, plus il en redemande. Le vélo est hyper stable dans la pente, et lorsque cela tabasse, il encaisse comme une vélo de descente. Certes, il n’a pas le côté plush que peuvent rechercher certains pilotes mais il est d’une efficacité
redoutable. Dans cette version 29 pouces, il va vite et il faut faire attention aux distances de
freinage et dans les virages serrés où il va nécessiter de faire un peu plus le singe sur le vélo pour enrouler la roue arrière, la faire pivoter plus
facilement. On pourra aussi facilement la jeter dans le creux du virage, le train arrière le supporte facilement. Ah, et si vous voulez savoir ce que donne le vélo en position basse sur le FlipChip, la réponse est… on ne sait pas. Pourquoi ? Parce que déjà là, nous n’arrivons pas à aller aux limites de la suspension, alors pourquoi charger encore plus l’amortisseur ? Inutile, sauf à aller sur un bike-park et se lancer sur des gros sauts. Mais ce n’est pas le terrain de jeu de l’Heckler.
Et en montage MX ?
Et bien justement, nous avons choisi de le rouler lors de notre deuxième journée. Pour ne rien vous cacher, nous avons eu beaucoup de mal à nous y mettre. L’arrière sautille plus, imposant plus de contrôle du vélo même si l’avant est stable. Plus que jamais, il faut veiller au bon ajustement de la détente sur l’amortisseur pour ne pas rendre l’arrière foufou et j’ai trouvé que l’arrière rentrait encore moins bien dans le débattement. Clairement, j’ai eu beaucoup de mal à contrôler le vélo, je l’ai trouvé moins sécurisant dans la pente, d’autant que dans les épingles, l’avant s’inscrit trop à l’intérieur de la courbe si on ne fait pas attention. Nous nous sommes fait plusieurs fois piéger, alors que ça n’a jamais été le cas avec le 29’’. La dissociation des sensations entre l’avant stable et l’arrière irrégulier est perturbante en descente et aussi en montée, où l’arrière bute beaucoup sur les obstacles. Le vélo devient alors beaucoup plus physique et impose de placer tout le temps la roue arrière, même si c’est facile, mais c’est tellement plus simple d’enrouler en 29’’. Certainement un mode MX qui ne convient pas à mon pilotage plus sur l’arrière.
On aime
Quelle polyvalence ! • Incroyablement efficace dans la pente et en côte • Equipement de qualité et particulièrement adapté au VTTAE • Autonomie enfin exploitable
On regrette
Mériterait d’être un peu plus confortable (moins de compression basse vitesse) • Le prix évidemment
Notes
Autonomie : 4
Confort : 4
Maniabilité : 4,5
Stabilité : 5
Prix/Equipement : 3
TOTAL : 16,4/20
Caractéristiques
Géométrie* | Fiche technique |
Tube supérieur : 599/600 mm Tube de selle : 405 mm Douille de direction : 100 mm Angle de direction : 64,8/64,5° Angle de tube de selle : 76,8/76,6° Bases : 460/461 mm Empattement total : 1 241/1 242 mm Hauteur de boîtier : 346/342 mm Reach : 455/452 mm Stack : 616/618 mm *FlipChip haut/bas (données constructeur) | Tailles : S (uniquement en 27.5’’), M, L, XL, XXL Cadre : Carbone CC Moteur : Shimano EP8, 85 Nm Contrôleur guidon : Shimano Mode Switch SW-EM800L Contrôleur sur cadre : – Batterie : Darfon 720 Wh Chargeur : – Fourche : Fox 36 Float Factory E-Tune, déport 44 mm Amortisseur : RockShox Super Deluxe Ultimate Freins : Sram Code RSC, ø203 mm Dérailleur arrière : Sram Eagle X01 AXS Pédalier : Shimano EM900,165 mm, 34 dents Commande : Sram Eagle X01 AXS Cassette : Sram Eagle X01 AXS, 10-52 dents Roues : av. Reserve Carbone 30 /Industry Nine 1 ; ar. Reserve Carbone DH /Industry Nine 1 Pneus : av. Maxxis Assegai Exo+ , 29×2.50 ; ar. Maxxis Minion DHR II Exo+, 29×2.40 Potence : Burgtec Enduro MK3, 42 mm Cintre : Santa Cruz Bicycles Carbon Di2 Riser, 780 mm Tige de selle : Fox Transfert Factory, 150 mm, ø30,9 mm Selle : WTB Silverado Team |
Distributeur : Santa Cruz Bicycles
Contact : www.santacruzbicycles.com