Avec le Jabba Wood 5, Rose, un acteur incontournable de la VPC, offre un bon rapport prix/équipement. Mais pour en profiter, il faudra en comprendre le mode d’emploi.
Les suspensions Fox CTD finition Factory sont reliées pour fonctionner en harmonie via la volumineuse manette double au cintre. Affiché 2 500 €, Rose confirme son potentiel rapport prix/équipement de qualité ! Mais attendez la suite. Le reste de l’équipement est tout aussi de très bon niveau avec du Sram X9 Type 2 en dérailleur arrière associé à un pédalier en 3×10. Un pédalier triple qui confirme deux choses : les Allemands n’aiment pas le double, et cela confirme encore un peu plus notre « crainte ». Rose aurait-il orienté ce nouveau Jabba vers une orientation marathon ? A voir sur le terrain. En attendant, la suite du tour du propriétaire.On aime particulièrement le look des composants Crank Brothers Cobalt 1 toujours aussi réussi. Les roues Easton EA70 sont compatibles tubeless d’origine, et avec deux valves et une bolée de liquide préventif, voilà un ensemble convertit en moins de cinq minutes. Comme pour la plupart des vélos vendus par correspondance, on retrouve un maximum d’éléments qui permettent de fiabiliser l’ensemble. Les gaines de dérailleurs sont intégrales, on trouve même un système d’étanchéité pour le câble de dérailleur avant afin d’éviter qu’il ne s’encrasse trop vite. Il faut quand même informer que l’entretien pourra poser problème si l’acquéreur ne compte que sur les détaillants alentours, faute de connaissances et d’équipements spécifiques.
Un Rose qui surprend sur le terrain
Dès les premiers roulages, un point attire l’attention : malgré une tige de selle sans déport, une selle avancée sur le chariot et un angle théorique de 73° pour le tube de selle, la position reste très inclinée vers l’arrière. Vérification faite, ce tube s’avèrera orienté à 71°… Ceci explique cela. Autre élément pouvant accentuer ce phénomène, le mode Climb de cette version (autrement dit le mode où la suspension est la plus ferme) est un peu trop léger, et dans les côtes les plus raides où on a justement besoin de conserver une assiette orientée vers l’avant, le vélo s’assoit encore trop, orientant davantage le tube de selle vers l’arrière. Ce comportement est constaté avec une précontrainte normale de l’amortisseur basé sur 25% de la course. On aurait tendance à vouloir le réduire et mettre 20 ou 30 PSI de plus dans l’amortisseur pour aider l’amortisseur à rester haut et conserver une bonne assiette en côte. Mais voilà, après la côte viendra la descente, et là, on aura plutôt besoin de l’effet inverse, cette fois, pour l’angle de direction. Nous n’y sommes pas encore. Avant cela, il y a encore beaucoup à dire sur la notion de rendement global. Cette notion qui fait intervenir le comportement dynamique intrinsèque du vélo (cadre, train roulant), mais aussi le positionnement sur le vélo (orientation vers l’arrière, centrée ou vers l’avant). La position du pilote donne plus ou moins de stabilité, d’équilibre, et permet de transmettre plus ou moins idéalement son énergie pour la transformer en vitesse. Ici, avec une selle positionnée théoriquement un peu sur l’arrière, avec, une fois n’est pas coutume pour un vélo allemand, un tube supérieur suffisamment long auquel on ajoute une potence de 100 mm, et vous voilà avec une position un peu trop allongée pour un vélo de all-mountain. De quoi confirmer que le Jabba est plus un marathon qu’un vélo prévu pour jouer. Pour compenser ce choix allemand, il faudra avancer la selle à bloc et opter pour une potence de 70 mm qui apporteront une solution et un comportement plus en phase de ce que l’on attend d’un 130 mm : plus recentré au-dessus du boîtier, moins XC.
Un dynamisme plaisant
En matière de rendement, le Jabba Wood a de quoi convaincre. Sa suspension arrière motrice parfaitement dans la plupart des secteurs. Son cadre est largement assez rigide, ses géniales petites roues Easton Tubeless contribuent à donner au coup de pédale un dynamisme plaisant, la compatibilité tubeless (sans fond de jante) en plus. On regrette vraiment que les suspensions en mode fermées restent si souples. D’autant plus dommage qu’avec la manette au cintre et le choix sur trois niveaux de fermeté, on aurait pu avoir une véritable différence entre chaque mode… mais ce n’est pas le cas. Du coup, le mode Descend, le plus ouvert, n’est à utiliser que pour les rythmes les plus cool où seul le confort est recherché. Pour le reste du programme, c’est minimum Trail, même en descente, ou Climb. Le choix de ce paramétrage, propre à ce Jabba Xood de Rose, est incompréhensible tant on trouve aujourd’hui des ensembles Fox CTD bien mieux étalonnés chez les concurrents. Abordons les premières descentes. Maniable et très vif, le Jabba Wood l’est d’autant plus que la liaison roue/fourche en axe de 15 mm apporte ce qu’il faut de rigidité. Cependant, si cet ensemble de paramètres et son comportement permettent d’avoir un pilotage justement dosé dans les sections lentes, dès que la vitesse augmente, cela devient gênant. Les grandes courbes rapides deviennent plus aléatoires et le sentiment de sécurité amoindri. Le vélo perd en stabilité…
Plus de stabilité avec une fourche en 140
Sans en faire un vélo d’enduro, nous avons décidé de rouler sur les étapes de la Trans-Provence, histoire de le pousser un peu plus dans ses retranchements. Pour l’occasion nous l’avons équipé en conséquence avec des produits référents dans le domaine. Doté de roues Mavic CrossMax ST, et de pneus Specialized Butcher, en plus d’une tige de selle KS i950, il y a largement de quoi se faire plaisir et lâcher un peu les freins. Rapidement la vivacité de la direction a posé problème. Seule solution pour apporter un peu de stabilité : sacrifier du débattement derrière en passant la précontrainte à 50%. Dans cette configuration, le boîtier de pédalier plus bas et une fourche plus ouverte sont bien plus bénéfiques que les inconvénients liés la perte de débattement. Une fois de plus, cela apporte la confirmation que pour aller vite, la géométrie prévaut sur le débattement. Evidemment l’idéal est d’avoir les deux. Notez que cette perte de débattement ne s’est pas forcément traduite par des talonnages excessifs, grâce à une progressivité importante en fin de course de sa cinématique. Même dans la dernière spéciale empruntant une interminable voie romaine assimilable à un champ de bataille afghan, le comportement de la suspension aura, avec 50% de précharge, été à la hauteur.
On se demande alors pourquoi Rose a ramené le débattement de la fourche à 130 mm alors que la hauteur permet d’avoir les 140 mm d’origine. Evidemment, la fourche aura été inversement légèrement sur-gonflée pour accentuer l’effet recherché, et obtenu. On note aussi que même dans cette configuration radicalisée, le système de freinage aura été tout à fait à la hauteur. On aurait presque pu dire la même chose de la transmission 3×10 avec son dérailleur arrière Sram Type 2 qui n’aura pas suffi à maintenir la chaîne, dans cette ultime et particulière sollicitation. On ne l’en blâmera pas tant dans cette situation, un anti-déraillement aurait été plus approprié. Vous l’aurez compris, le Jabba Wood n’est pas un véritable all-mountain, à moins d’entrer dans des manipulations compliquées. Notre démarche a surtout eu pour but de montrer qu’on a toujours la possibilité de jouer avec la nature première d’un vélo en commençant par l’ajustement des suspensions, quitte à passer par des réglages qui paraissent absurdes. Les résultats peuvent être, comme ici, très significatifs. Mais rassurez-vous, il est aussi tout à fait possible de le régler conformément aux préconisations sans remplacer quoi que ce soit. Dans ce cas, le Jabba Wood saura très bien vous conduire sur les chemins en montagnes vallonnées mais dans un esprit plus marathonien, ou cross-country à grand débattement. Il n’en restera pas moins que le calibrage de l’hydraulique des amortisseurs ne seront pas parfaits, forçant à abuser du mode Climb pour durcir le vélo et lui apporter une bonne dose de rendement. Dernier point, n’hésitez pas à passer la fourche en 140 mm, vous gagnerez une stabilité qui fait défaut au Jabba Wood d’origine.