Pivot Mach 5.5 Carbon Pro XT/XTR : Faut que ça bouge !

Après une année 2016 chargée, Pivot n’en finit pas de renouveler ses gammes. Cette fois c’est à son modèle polyvalent de passer à la moulinette. Voici le Mach 5.5 Carbon, un pur produit taillé pour tout affronter, mais avec quand même un gros penchant pour la pente.

DR. T. Zaniroli

[Htab][tab title=”PRIX”]7399€[/tab][tab title=”POIDS”]12,90 kg sans pédales en taille M[/tab][tab title=”DEBATTEMENT”]Déb. av. : 160 mm | Déb. ar. : 140 mm[/tab][tab title=”USAGE”]Compétition, vallonné, montagne.[/tab][/Htab]

Au fil des années, et des modèles, Pivot a su s’imposer par la qualité de ses cadres qui allient une géométrie souvent parfaite, une cinématique de suspension développée par le guru Dave Weagle, sans compter un objectif qui a déclaré le poids comme ennemi du vététiste. Après une année 2016 bien chargée en nouveaux modèles, on pensait que l’Américain allait s’autoriser une pause bien méritée. C’était sans compter sur la perversité de son emblématique directeur Chris Cocalis. Voilà donc le Mach5.5 Carbon, une sorte de pont entre un Mach 429 et un Mach6, un produit à qui la marque dévoue un large spectre d’utilisation. En effet, celui qui affiche 140 mm de débattement à l’arrière et 160, oui 160 mm à l’avant, est prévu pour un usage cross-country agressif jusque enduro léger… Voilà qui peut surprendre. Surtout si l’on parle de géométrie. En effet, le Mach 5.5 ne fait pas dans la dentelle, au point de le penser beaucoup plus enduro que vélo à tout faire. Premier constat, le supérieur est long et le reach (l’allonge) qui l’accompagne est du même acabit (440 mm) sur ce taille M. Fort heureusement, les gens chez Pivot étant de vrais passionnés et connaisseurs du VTT, lui ont adjoint une petite potence de 55 mm. De quoi lui conférer sur le papier une bonne maniabilité malgré un triangle avant long. L’ambiance est encore plus orientée vers la pente lorsque l’on voit que la direction pointe à 65,5°, en statique ! On est quasiment sur des valeurs qui défrayaient la chronique il n’y a pas si longtemps, en descente… Avec ce genre de chiffres, on se dit quand même que le Mach5.5 Carbon n’est pas équipé pour pédaler mais plus pour attaquer dans les descentes.

Pour construire un cadre aussi léger que possible, Pivot a dû avoir recours à beaucoup de fibres de carbone haut module, sans pour autant garder à l’esprit que le châssis devait être aussi rigide que leur Switchblade, le vrai modèle d’enduro de la marque (un 29” compatible 27.5”+). Avec 2,35 kg en taille M, mais sans son axe arrière et autres couvercles de batterie, patte de cadres etc… le Mach 5.5 est plutôt dans la catégorie basse au regard de son programme. L’objectif est atteint. Vous allez me dire qu’à 3 700 € le cadre, c’est le moins que l’on puisse lui demander. Certes, mais contrairement à quelques autres marques concurrentes, Pivot n’est pas pingre avec son consommateur. Le cadre regorge de petites attentions qui lui permettront par exemple de le conserver longtemps en bon état. On compte ainsi plein de petits détails comme des pièces de plastique mou intégrées dans le cadre au niveau des passages de la chaîne (hauban, bases etc…) ou sous le tube diagonal. Mais c’est aussi une patte de frein arrière directement prévue pour les disques de ø180 mm (plus d’adaptateurs) ou encore des pré-équipements pour la transmission électrique Shimano Di2 et la suspension intelligente Live de Fox (voir encadré). Autant de détails qui valorisent le produit.

Avec un avant tranchant et un arrière joueur, le Pivot Mach 5.5 Carbon est un exhausteur de sensations… tant que ça descend et que ça virevolte.

Le châssis est construit autour de roues en 27.5” et pneus WT, comprenez Wild Trail, un gros mot qui signifie qu’il ne s’agit pas de pneus en Plus (2.8 à 3.0 de large). Il est donc conçu pour des pneus en 27.5×2.6 sur des jantes bien larges (35 mm interne). Ce pneu semble avoir finalement la préférence des marques puisqu’il offre une empreinte au sol supérieure à un gros 2.35 ou un 2.5 (mais à une hauteur de pneu quasi similaire), mais une confiance sur le terrain assez proche d’un 2.8-3.0, mais avec beaucoup moins de flou. Les avantages sans les inconvénients, enfin sur le papier car au roulage, le Mach 5.5 Carbon n’est pas franchement ce qui se fait de mieux. Ce n’est pas faute de disposer d’une suspension arrière qui tente de combattre le pompage, qui privilégie le grip sous la pression des pédales, non, c’est juste que le train roulant est ainsi paresseux au décollage. D’ailleurs un mot sur la suspension. Pivot est depuis des années un promoteur de la cinématique développée par Dave Weagle (DW Link).

Promoteur de Dave Weagle

DR. T. Zaniroli

Au fil des années, elle s’est affinée, atteignant aujourd’hui son point d’apogée. Plus que jamais, elle est capable d’offrir un amorti sur le petit choc tout en préservant la suspension d’un pompage excessif. Pour cette nouvelle mouture, Pivot lui a d’ailleurs offert encore plus de sensibilité, notamment en passant l’ensemble des points de pivots sur roulements, y compris la fixation de l’amortisseur sur la biellette. Pour renforcer la liaison entre le triangle avant et arrière, la biellette supérieure s’inspire directement de son grand frère d’enduro mais sans pieds, en prise directe. Elle est massive et sur le terrain joue bien son rôle. Au point de se demander d’ailleurs si c’était bien nécessaire autant d’apport de rigidité tant l’arrière est court (bases de 432 mm) et large (Boost 148), limitant ainsi le bras de levier lors des gros appuis. En tout cas, vu comme ça, le Mach5.5 en jette. Surtout que vous avez sous les yeux l’un des modèles d’entrée de gamme. Pour le premier prix, comptez 5 899 €, le Race XT. En haut de l’affiche, c’est le prix d’une petite voiture qu’il faudra justifier à son banquier (11 999 €). Le cadre reste le même, l’équipement change. Notre modèle de test est pour nous le bon compromis. Les roues DT Swiss font parfaitement leur job, la transmission Shimano en panachage XT et XTR est sans reproches, tandis que sur le papier les freins Shimano XT sont valorisants. Du côté des composants, la tige de selle Fox Transfer épate par sa souplesse de fonctionnement (ici en 125 mm de débattement, une 150 mm ne pouvant trouver place sur un taille M car il serait alors impossible d’avoir une hauteur de selle inférieure à 730 mm), même si elle prend rapidement un “jeu de fonctionnement”. Pour le poste de pilotage, Pivot a favorisé sa propre marque Phoenix, qu’elle lance d’ailleurs en parallèle au détail. Le cintre carbone est très proche d’un Enve, tout comme la potence.

Le roi de la pente…

A lire la fiche technique, le taille M ne serait pas prévu pour les pilotes d’1,70 m… Trop grand paraît-il. Surprenant car nous, on s’y trouve parfaitement posé en allonge. Il nous faudra juste avancer un peu la selle pour obtenir une bonne position de pédalage, en raison d’un boîtier un peu trop avancé. Côté réglages des suspensions, Pivot a facilité le travail avec un indicateur de précontrainte sur l’amortisseur. On est sur une base de 18-20 mm, soit environ 30%. A l’avant, la nouvelle Fox 36 millésime 2018 avec sa nouvelle chambre d’air demande juste un peu moins d’air que sur la précédente pour être réglée.

Pour chauffer les suspensions et le pilote, rien de moins qu’un petit passage par un petit enchaînement de sauts et autres tables, et déjà le Pivot se dévoile. Ultra facile d’accès, il met tout de suite le pilote dans une position sereine. Le vélo prend son envol avec aisance, et se contrôle sans rechigner en l’air. Sur les réceptions, c’est une autre histoire. Le débattement est englouti, certes sans coup de raquette mais ça vient en butée à l’arrière. Effectivement, le Fox manque de tenue sur les gros chocs et l’accumulation de chocs moyens. Il faut impérativement lui ajouter des cales dans sa chambre d’air pour équilibrer le vélo avec l’avant. L’opération est facile à faire. Notez qu’il ne faudra pas hésiter à réduire la vitesse de retour de l’hydraulique à l’avant comme à l’arrière pour compenser le rebond des pneus qui est assez présent (1,4 bar à l’avant et 1,6 à l’arrière).

… Et des virages

DR. T. Zaniroli

Les enchaînements de virages serrés dans la pente se transforment en une accumulation de tours de manège avec, à chaque courbe avalée, un pompon décroché. Malgré un empattement avant conséquent, le vélo offre une aisance déconcertante (merci le large cintre et l’arrière court). On pousse sur l’arrière en appuyant sur les pédales dans le creux de la courbe, pour propulser l’avant vers la sortie du virage à Mach 12. Le grip générant une sorte de « wouap » super gratifiant. Les vitesses de passage peuvent vite dépasser l’entendement, tant que le grip latéral des pneus est là. Le Pivot se place au millimètre en pivotant sur son train arrière. Juste ce qu’il faut ! Sans forcer, ni subir la rigidité du triangle avant, le Mach 5.5 Carbon est magique dans ces segments. Dans les grandes courbes prisent à pleine vitesse, l’arrière qui fait miracle dans le sinueux lent, aurait pu ici être un handicap. Perdu ! La stabilité procurée par la partie avant du vélo, et sa hauteur de boîte bien calibrée, plaquent le vélo comme une ventouse. Et si tant est que l’arrière ait des envies de fuite, il se contrôlera aisément par l’action des cuisses sur les côtés de la selle pour le remettre en ligne. L’efficacité, la précision et la force latérale subjuguent dans les virages rapides. Encore une autre courbe et vous succomberez aux charmes du Pivot : c’est de la drogue dure !

Les freins, eux, demandent un temps d’accoutumance en raison d’un manque de constance au toucher, et d’une puissance qui n’est pas franchement au rendez-vous. Au point de vous les déconseiller si vous décidez de vous présenter sur une manche d’enduro. Pas fiables. Pour vous dire, on s’est retrouvés sans frein arrière à un moment critique, et il a fallu un second pompage salvateur sur le levier pour que la roue arrière daigne se bloquer. C’est d’autant plus dommage que l’on éprouve un immense sentiment de sécurité au guidon du Pivot, qui répond au doigt et à l’œil dans les situations les plus critiques et qui procure un intense plaisir à piloter.

On ne doit pas se battre à son guidon pour aller vite et prendre du plaisir. Chaque mètre effectué dans la pente submerge d’émotions qui vous le rendent bien sur un chrono. Efficace le bougre. On va tellement vite dans les descentes que l’on se demande à quoi bon ce foutu plateau de 30 dents ! On mouline, on manque de tenue sur les pédales. En fait il suffit d’entamer la première ascension pour comprendre. Le Pivot Mach 5.5 n’est pas un grimpeur né dans cette configuration. Là où les Maxxis font miracle dans la pente, ici, il transforme le vélo en ventouse. Impossible de joueur les grimpeurs sans taper dans les réserves. On se met en danseuse pour relancer, en vain. Le Mach 5.5 monte à un petit rythme, sans vraiment laisser le temps à son propriétaire de se reposer. En effet, entre ses bases courtes et son angle de direction couché, il doit se battre avec une roue avant qui s’allège, emporté par le poids du pilote vers l’arrière. Il faut alors obligatoirement agir sur la manette de l’amortisseur pour le rendre plus dur en début de course afin de relever le cul du vélo, tout en se positionnant sur le bec de selle. C’est d’autant plus dommage que la suspension arrière est top. On la sent avaler les racines sur notre passage, tout en luttant contre le pompage. En résumé, il faut prendre son temps. Les bouts de ligne droite ne sont pas non plus sa tasse de thé. Alors oui, une fois la mise en vitesse passée (que de watts dépensés…), il roule bien. Mais franchement avec presque 64° d’angle à l’avant quand on est en selle, un cintre de 800 mm qui fait aller et venir de gauche à droite la roue avant à peine vous lui appuyez, on ne peut pas dire que ce soit son terrain de jeu.

Le Pivot Mach5.5 Carbon dans cette version presque considérée comme un entrée de gamme (sic !) facturée 7399 €, ne se montre pas aussi radical que nous le pensions, et parvient même à considérer une relative facilité qui le rend utilisable pour nombre de vététistes. Pour autant, il est plus enduro qu’un vélo à tout faire dans son tempérament. Disons-le clairement, dans les côtes, ce n’est pas un champion, et sur le plat, il faut d’abord bien le lancer pour qu’il conserve sa vitesse. Lui ce qu’il aime, c’est le technique, la pente et le tour de manège.

Caractéristiques

FICHE TECHNIQUE : Tailles : XS, S, M, L, XL – Modèle d’essai : M – Cadre : Carbone Light Premium – Fourche : Fox 36 Factory – Amortisseur : Fox Float Factory DPS EVOL – Freins : Shimano XT, ø180 mm -Dérailleur arrière : Shimano XTR, 11vit. – Pédalier : Race Face Aeffect SL, 30 dents – Dérailleur avant : – Commandes : Shimano XT – Cassette : Shimano XT, 11/46v – Roues : DT Swiss M1700-35mm  -Pneus : av. : Maxxis Minion DHF WT 27.5″ x 2.6″ ; ar. : Maxxis Rekon WT 27.5″ x 2.6″ – Potence : Phoenix Team Enduro/Trail , 55 mm – Cintre : Phoenix Team Carbon, 800 mm – Tige de selle : Fox Transfer, 125 mm (t.M), ø30,9 mm – Selle : Phoenix WTB Vigo Pro – GEOMETRIE taille M : Tube supérieur : 615 mm – Tube de selle : 435 mm – Angle de direction : 65,5° – Angle de tube de selle : 73,5° – Bases : 432 mm – Empattement total : 1 188 mm  – Hauteur de boîtier : 345 mm – Reach : 440 mm – Stack : 610 mm.

Distributeur : Mohawk’s Cycles, Contact : www.mohawkscycles.fr

RENDEMENT [star rating=”3″]
CONFORT [star rating=”4″]
MANIABILITE [star rating=”4″]
STABILITE [star rating=”4.5″]
PRIX/EQUIPEMENT [star rating=”4″]

[quote] On aime : Sensation de facilité dans le technique • Géométrie idéale dans la pente • Tous les petits détails sur le cadre
On regrette : Pas assez polyvalent • L’amortisseur qui impose d’ajouter des cales pour être opérationnel sur ce vélo.[/quote]