Trek Top Fuel 9.8 SL : un trait sur le passé !

DR N. Le Carré

Dans l’imaginaire collectif, le dernier Trek Top Fuel, en plus d’être une œuvre d’art, était également un vélo ludique aussi prompt à s’aligner sur une manche de Coupe du monde de XC que de marathon. La nouvelle mouture sera-t-elle faire mieux ? Pas si sûr…

Trek Top Fuel 9.8 Sl (8)
DR N. Le Carré

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[tab title=”PRIX”]4999€[/tab][tab title=”POIDS”]10.90 kg sans pédales en taille M[/tab][tab title=”DEBATTEMENT”]Déb. av. : 100 mm | Déb. ar. : 100 mm[/tab][tab title=”USAGE”]Compétition, rando-sport, vallonné, plaine.[/tab][/Htab]

L’histoire du Top Fuel de Trek est un véritable roman maillé de nombreux succès. Le premier souvenir que j’en ai, c’est lorsqu’en mai 2001, Roland Green, une chaudière canadienne notoire, remporte la manche de cross-country à Houffalize (le temple du vélo en Belgique) en tout-suspendu. Une véritable bombe nucléaire dans un milieu qui ne prônait que le hardtail. La deuxième grande étape de l’aventure se déroule fin 2009 lorsque Trek lance certainement le plus beau vélo de la production mondiale jusqu’aujourd’hui. Des lignes à couper le souffle, et qui hantent encore mes rêves, un comportement dynamique qui cloua au poteau le Specialized Epic avec son amortisseur Brain, mais un cadre qui ne passera pas l’étape du passage au 29”. En 2013, il sera sacrifié par Trek au profit de la gamme Gary Fisher avec son Superfly Pro SL (qui deviendra FS par la suite) qui, à ce moment, avait plus de légitimité à continuer l’aventure 29”. 2015, l’histoire se venge. Trek a décidé de relancer le Top Fuel et fait disparaître le Superfly FS du catalogue 2016 pour faire renaître la légende.

Il est de retour !

Vous l’aurez compris, le retour du Top Fuel dans le rang des VTT tout-suspendus de cross-country de Trek était plus qu’attendu. Et autant vous le dire, vu les souvenirs que nous a laissés le dernier opus, le nouveau venu a du pain sur la planche. Esthétiquement, même s’il rentre franchement dans le rang en intégrant l’identité visuelle des autres modèles tout-suspendus de la gamme, il ne démérite pas. Et vu l’attroupement que sa sortie sur les sentiers génère, surtout dans cette livrée bleu azur, on peut dire que Trek ne s’y est pas trompé. Techniquement, il arrive en roues de 29” (à l’exception de la plus petite taille, 15.5”, qui se pare de roues en 27.5”), avec tout ce qui a fait le succès de la génération 2009. Exit donc l’amortisseur fixé sur le tube horizontal du Superfly FS, le voici monté flottant sur les bases pour lui offrir plus de sensibilité au déclenchement. A l’arrière, il adopte également l’axe concentrique autour du moyeu (Actibe Braking pivot) qui permet de libérer la suspension des contraintes liées au freinage (sur un monopivot, comme le Trek Top Fuel, la suspension a tendance à se bloquer lorsque l’on freine de l’arrière, sauf si le point de pivot arrière est logé autour du moyeu). Marchant sur les traces des Trek Fuel EX et Remedy, le Top Fuel arrive avec une biellette monopièce qui se pare du même gadget très en vogue en ce moment, le Mino Link. Située au point de rencontre entre le hauban et la biellette, une petite pièce permet de faire changer la géométrie du vélo selon son positionnement. Enfin, premièrement, quand les vis veulent bien se desserrer… et deuxièmement, vu l’incidence sur la géométrie, (0,5° d’angle au niveau de l’angle de direction, et +/- 8 mm de hauteur de boîtier de pédalier), autant vous dire qu’on a préféré rester dans la version la plus logique : boîtier bas, angle de direction ouvert. Surtout que dans cette position, on ne peut pas dire que Trek joue la carte de l’extrême puisque l’on est quasiment sur les bases de la géométrie du modèle de 2009 (les roues 29” en plus). Un angle mesuré à 69,5°, et un boîtier à 330 mm, on est donc sur une base bien moderne. Alors fermer l’angle et remonter la boîte de pédalier de 8 mm, non merci  !

Un tour d’horizon rapide sur le cadre construit en carbone OCLV Mountain, pour vous dire qu’il affiche un très beau 1 900 g dans cette taille de 17,5” (peint, avec visserie et amortisseur), que ses bases restent en aluminium, que les gaines passent soit en interne avec pré-équipement pour le Shimano Di2, soit en externe (comme sur l’ancien Superfly FS), de quoi offrir pas moins de 54 différentes combinaisons de montage de gaines (incluant les tiges de selle à hauteurs variables) et que ce beau vélo passe au format Boost 110 et Boost 148 pour les moyeux (voir encadré Promoteur du Boost)…

Evolutions des mœurs

Voilà presque cinq ans de passés, et le Top Fuel ne semble pas avoir changé d’un iota. La géométrie est quasiment la même, à l’exception de train arrière qui s’est allongé d’un peu moins de 10 mm pour faire passer les roues en 29”. La position en selle est toujours aussi confortable et équilibrée, même s’il faut remonter exagérément le poste de pilotage en raison d’une douille très courte, pour s’ajuster à la hauteur de selle. Reste la mise en route de la bête, comprenez les réglages des suspensions. Trois solutions se proposent à vous. La première, suivre les préconisations de Trek, à savoir mettre 110 psi dans la fourche RockShox Sid XX et 170 psi dans l’amortisseur RockShox Monarch XX à l’arrière pour un pilote de 75 kg. 110 et 170 psi ! Heu…. Oubliez ! Si vous avez l’âme cross-country compétition, alors basez-vous sur la seconde solution : une précontrainte arrière de 20 % avec 140 psi dans l’amorto. A l’avant, mettez 80 psi, de grâce pour vos avant-bras. Dans ces conditions il sera certes difficile d’arriver au bout des 100 mm débattement de la suspension arrière, même en attaquant comme un forcené dans des descentes bien défoncées, mais au moins vous aurez un bon compromis entre un pompage limité et un bon amorti des petits chocs. Là, le vélo répondra bien, profitant de sa faible masse pour bondir à la sollicitation de la pédale, mais il n’y aura pas de confort de roulage sur les chocs intermédiaires. Cependant, une chose chagrine. Pas d’explosion au démarrage, pas de sensations de vitesse, mais que se passe-t-il ? On aurait perdu en dynamisme ? En sensation, clairement… La rigidité du triangle avant impose de violenter le vélo à la pédale pour en tirer la quintessence, même avec l’amorto bloqué. Les roues ? Pour avoir essayé le vélo avec un autre train roulant, connu pour son dynamisme, la différence n’était pas aussi flagrante. Certes la rigidité globale du cadre que Trek a voulu est moins importante pour plus de tolérance, mais la boîte de pédalier est beaucoup trop bridée pour le pilote moyen. Heureusement en montée, la stabilité est surprenante, même avec une potence plus haute. Même sur des 20-25% de pente, il ne décroche pas ! Il motrice bien si l’on reste assis en selle. Et quelle selle ! Confortable, avec une assise qui cale parfaitement pour bien pédaler, au top ! C’est moins évident si on se met debout sur les pédales. Un léger pompage imprime le rythme, mais ce n’est pas le plus dérangeant. Le pneu ripe alors souvent sur les racines. C’est pourquoi nous vous proposons la troisième solution : mettre 30% de précontrainte (120 psi dans l’amorto). Profitez-en pour réduire aussi la pression à l’avant avec 70 psi mais en ajoutant une cale dans la chambre d’air (deux Token d’origine). Vous gagnerez un confort royal sans taper dans le débattement.

La partition semble jouée… et non !

DR N.Le carré
DR N.Le carré

Le vélo change alors de tempérament. Moins crosseur, il se transforme en marathonien, en étant moins usant au fil des kilomètres, et s’avère encore plus facile en descente, et un peu plus facile dans les enchaînements de virages. La roue arrière reste bien au contact du sol, même dans le défoncé. Et si les freins Shimano XT nouvelle génération de notre modèle de test n’ont pas brillé par leur puissance, la suspension arrière qui reste toujours active même lorsque l’on freine, permet de réduire les distances de freinage.

N’ayez crainte, on ne s’endort jamais à son guidon. Avec ces réglages, même si le Top Fuel impressionne par sa stabilité, il laisse heureusement une (petite) marge pour que le pilote puisse jouer avec le terrain. Première courbes serrées, le bestiau vire d’un bloc grâce à sa partie cycle qui ne fléchit pas plus qu’il ne faut. On fait corps avec la machine, en enroulant le virage en passant le fessier derrière la selle, et en engageant les épaules. Ici on accompagne le vélo avec force, faute d’avoir un cintre large, et un arrière un peu paresseux. On peut cependant compter sur une direction consistante et précise qui procure un excellent ressenti du terrain, mieux, qui pose la roue exactement là où on lui a dit d’aller. L’apport du Boost 110 à l’avant est incontestable (même si les moyeux DT Swiss de notre modèle ne sont pas encore prévus pour l’élargissement du contact moyeu/fourche). La rigidité qui en ressort transforme la SID qui n’est pourtant pas connue pour sa rigidité en version classique… A l’arrière, franchement c’est difficile de le sentir.

On ne revient jamais indemne de l’essai d’un Trek Top Fuel. Il y a bientôt cinq ans, il m’avait laissé un souvenir impérissable au point d’avoir encore un poster de ce vélo dans mon bureau. Cinq ans plus tard, mes attentes étaient peut-être trop fortes. Oui, ce vélo offre un rendement digne de son statut. Les performances sont là, les chronos l’attestent, mais pas les sensations. Il a perdu son grain de folie au profit d’un comportement exclusivement tourné vers un pilotage sain et consensuel. Tous les pilotes pourront en tirer parti même sans avoir un gros bagage technique. Il a perdu de son exclusivité, mais se fait plus passe-partout et les chronos l’attestent, c’est un sérieux compétiteur puisqu’il se classe deuxième sur notre parcours test.

Promoteur du Boost

Le format Boost en 110mm à l'vant dont Trek est le précurseur. DR N. Le carré
Le format Boost en 110mm à l’vant dont Trek est le précurseur. DR N. Le carré

Trek est à l’origine du format de moyeu Boost 110 avant et Boost 148 arrière. Il a initialement été mis en place sur le Remedy 29” pour trouver une solution aux problèmes qu’il rencontrait pour rendre les roues 29” plus rigides sur son vélo d’enduro. L’idée est d’élargir l’entraxe des moyeux, pour écarter les flasques et donc augmenter l’angle du rayonnage et par conséquence augmenter la rigidité de la roue. Accessoirement, le Boost 148 permet également de réduire la longueur des bases. C’est ainsi que le Top Fuel a pu passer de 452 mm sur le Superfly FS à 436 mm sur cette nouvelle mouture. Certes nous ne sommes pas aux performances du Kona Process 111 avec un peu plus de 425 mm pour un 29”, mais ici le Trek Top Fuel conserve la possibilité de mettre un dérailleur avant.

Ce qu’il faudrait changer

La première chose à faire serait de mettre un cintre plus large pour mieux contrôler la direction lors des changements de direction rapides. De plus, cela permettra d’avoir une meilleure stabilité d’appui en descente. Le train de pneus d’origine est lui très tourné vers les terrains secs. Il offre un très bon rendement et une forte qualité de roulage, mais un manque de grip devant. Dans un premier temps, on changera le pneu avant pour un profil ayant plus de grip, histoire d’assurer les trajectoires, un Bontrager XR4 Team Issue TLR par exemple. A l’arrière, sa glisse facilement contrôlable en virage vous permettra de le conserver en automne mais il faudra faire attention à ne pas trop ripper sur les racines humides en côte. Enfin, reste les poignées, mais c’est une histoire de goût, elles sont un peu fines. Pourquoi ne pas les remplacer par les Bontrager RaceLite au diamètre plus large et au confort revu à la hausse (environ 23 €) ?

Caractéristiques

FICHE TECHNIQUE : Tailles : 15.5 (27.5”), 17.5, 18.5, 19.5, 21.5” – Modèle d’essai : 17.5” – Cadre : Carbon OCLV mountain / alu – Fourche : RockShox Sid XX – Amortisseur : RockShox Monarch XX – Freins : Shimano XT, ø160 mm – Dérailleur avant : – Dérailleur arrière : Sram X01 – Pédalier : Sram X1 1400, 32 dents – Commandes : Sram X1 – Cassette : Sram XG-1175, 10-42 – Roues : DT Swiss X1700 Spline 2 (Boost110 et Boost148) – Pneus : Bontrager XR1 Team Issue TR, 29×2.20 – Potence : Bontrager Race X-Lite, 85 mm – Cintre : Bontrager Race X-Lite Carbone, 700 mm – Tige de selle : Bontrager Rythm Elite, ø31,6 mm – Selle : Bontrager Montrose Elite – GEOMETRIE taille 17.5 : Top tube : 580 mm – Tube de selle : 422 mm – Angle de direction : 69,5° – Angle de tube de selle : 74° – Bases : 436 mm – Empattement total : 1 116 mm – Hauteur de boîtier : 330 mm – Reach : 427 mm – Stack : 577 mm.

Distributeur : Trek France, Contact : www.trekbikes.com

RENDEMENT [star rating=”4″]
CONFORT [star rating=”3.5″]
MANIABILITE [star rating=”3.5″]
STABILITE [star rating=”4″]
PRIX/EQUIPEMENT [star rating=”3.5″]

[quote] On aime : Rendement • Stabilité dans la pente et les grimpettes • Look
On regrette : Réglage Mono-Link inutile • Aseptiseur de sensations • Cintre court.[/quote]