Canyon Exceed CF SLX 9.9 : Trop d’excès ?

Apparu aux mains d’Alban Lakata lors des derniers championnats du monde de marathon, qu’il a remportés, ou sur la Cape Epic, l’Exceed CF SLX arrive désormais sur le marché avec une ambition forte : être la nouvelle référence de cross-country/marathon. Avec son cadre affichant 870 g, il part sur de bonnes bases, mais est-ce suffisant ?

DR T. Zaniroli
DR T. Zaniroli

[Htab][tab title=”PRIX”]3949€ frais d’expédition et la boîte d’envoi inclus.[/tab][tab title=”POIDS”]9.8 kg sans pédales en taille M[/tab][tab title=”DEBATTEMENT”]Déb. av. : 100 mm | Déb. ar. : – mm[/tab][tab title=”USAGE”]Compétition, vallonné, plaine.[/tab][/Htab]

Pour ne rien vous cacher, cela faisait longtemps que nous attendions de pouvoir poser nos fesses sur le Canyon Exceed CF SLX. Entre une présentation reportée juste avant le Roc d’Azur de l’année dernière en raison de problèmes techniques sur le cadre, puis le retard de production lié à la mise en place de la nouvelle usine de l’Allemand, il nous aura fallu attendre plus d’une demie année pour enfin le découvrir en vrai. Remarquez cela nous a laissé le temps de lire de long en large la brochure descriptive de la bête et d’avoir des attentes énormes sur ce vélo. Difficile de rester insensible à l’appel des 870 g du cadre. C’est quand même près de 300 g de moins que celui du Grand Canyon CF SLX, qui avait jusque-là la charge de représenter le savoir-faire de la marque en matière de vélo léger destiné au cross-country, et qui au passage sortait du lot par son confort distillé au fil des kilomètres. Pour obtenir ce résultat, les ingénieurs maison sont repartis d’une feuille blanche et le résultat, soyons clairs, donne un sacré coup de vieux au Grand Canyon !

Pour aller chercher un châssis sous la barre des 900 g, les ingénieurs ont cherché à minimiser la matière partout où c’était possible. C’est le procédé, au nom très marketé de Minimal Surface Concept, vise par exemple à utiliser moins de carbone sur les points de contacts entre les tubes par exemple. Ainsi si l’on compare avec le Grand Canyon CF SLX, il gagne 109 g. Si l’on prend la jonction entre le tube de selle et les haubans, la pièce faisait 124 g avant. Aujourd’hui c’est 91 g. Au niveau de la boîte de pédalier, on passe de 190 à 143 g. Quant à la colonne de direction, c’est 29 g de gagnés. La réduction du poids passe également par la forme du cadre. Des lignes plus directes sont synonymes de moins de matière, donc plus de légèreté. La ligne droite et des tubes plus courts ont donc été privilégiés au maximum. Enfin, leurs sections ont été affinées en optimisant leur forme. Le tube diagonal qui affichait 207 g sur le Grand Canyon devient un outrageant 146 g sur l’Exceed. Mais nous ne sommes pas encore à 300 g ! Vous avez raison. Les pattes arrière ont elles aussi été repensées. L’étrier de frein positionné entre le hauban et la base permet de se passer de renforts (c’est à l’étrier que revient cette charge) et offre une nouvelle forme aux pattes, une forme plus aérienne. C’est 32 g de gain. Pour l’occasion, l’intégration directement dans le cadre de la patte de dérailleur, qui reste rapportée, a permis de se passer de visserie superflue. Et tout le reste est à l’avenant. Enfin, côté carbone, le Canyon Exceed CF SLX joue avec différentes fibres selon les zones de contrainte. On trouve ainsi du HT (High Tensile) qui dispose de propriétés élastiques, du HM (High Modulus) qui mixe la légèreté et la rigidité ou encore le IM (Intermediate Modulus) pour les zones plus classiques. 870 g ! Cela permet de vous présenter un premier prix à 3 300 € affichant moins de 10 kg sans pédale. Notre modèle de test, l’Exceed CF SLX 9.9, affichant lui 9,8 kg, soit le même poids, mais 600 € de plus ! Oui… c’est le poids de la fourche RockShox RS-1, mais sur le terrain, ça se justifie, je vous le promets ! Notez que la version la plus haut de gamme est annoncée à 7,8 kg ! Pas mal non ? Mais revenons au factuel.

Une feuille blanche pour base de travail

La géométrie n’est pas en reste puisqu’elle entre dans l’ère de la modernité. Traduction : le cadre dispose d’une allonge (Reach – distance virtuelle à l’horizontal entre le centre de la douille de la direction et l’axe de pédalier) plus longue. On en est ainsi sur 425 mm de reach pour un tube supérieur de 600 mm. L’ensemble est associé à une potence de 80 mm sur notre taille M (70 mm en XS et 90 mm en L et XL). Le but recherché est d’apporter une plus grande stabilité au triangle avant. Surtout que la direction pointe à 69,5°. Cela donne un empattement avant plus long d’environ 10 mm par rapport au Grand Canyon et un angle de direction un peu plus ouvert de 0,5°. Côté cotes, les bases sont fixées à 432 mm sur notre modèle, mais elles sont plus longues sur le L et encore plus sur le XL (plus courtes sur le XS qui dispose par ailleurs de roues en 27.5”). Finie la standardisation des bases qui désavantageait les grandes tailles. Il en va de même pour la hauteur de boîtier de pédalier qui évolue selon la taille du cadre. Désormais, Canyon rentre dans le club des grands constructeurs capables d’adapter leur vélo à toutes les tailles de pilote.

Cerise sur le gâteau, le cadre dispose de passages de gaines en interne particulièrement faciles à mettre en place, d’une trappe d’accès pour une éventuelle batterie pour une transmission électrique Shimano Di2, ou encore d’un diamètre de tige de selle en 30,9 mm. Pourquoi ce diamètre alors que normalement on privilégie du 27,2 mm en cross-country, véritable gage de confort… Il faut trouver la réponse dans le fait que les ingénieurs ont prévu que l’Exceed CF SLX pourrait recevoir une tige de selle télescopique à gaine interne. Dans ce cas, les modèles les plus courants sont en ø 30,9 mm. Notre modèle de test est lui équipé, comme le reste de la gamme, de la tige de selle S25 VCLS 2.0 CF. Elle est formée de deux lames en carbone réunies par le chariot de selle et un boulon sur le bas qui va permettre de régler l’horizontalité de la selle en statique. L’intérêt de cette tige de selle est d’offrir environ 7 mm de balancier (la selle restant à l’horizontal) et donc d’offrir une dose en plus de confort.

Boule de nerfs exigeante

DR T. Zaniroli
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Il est là, enfin. Après avoir passé quelques minutes pour régler l’engin, on se dit qu’il taille effectivement long en tube supérieur. Un pilote d’1m75 sera certainement plus à l’aise sur un taille S qu’un M, ou alors il lui faudra passer sur une potence de 70 mm. Le galbe du cintre est surprenant, déroutant même. Pas assez cintré vers le pilote, il génère des fourmis dans les mains (plusieurs de nos testeurs ont eu le souci), sauf à le faire remonter vers le haut. Somme toute, ce réglage ne dérange pas car il permet de mieux appuyer sur le cintre dans les courbes, de quoi bien prendre de l’angle. Première accélération et là surprise, ça pulse ! L’Exceed ne se désunit pas d’un pouce. On ne peut pas dire que la mise en route soit explosive avec tout le monde, mais une fois lancé, la bête file. Pourquoi tout le monde ne pourrait pas tirer profit de ce vélo ? Pour comprendre la chose, il faut regarder la boîte de pédalier et ses bases finalement assez épaisses. L’ensemble est tellement large avec son boîtier au standard BB92, que rien ne semble vouloir le faire fléchir. Du coup, il ne faut pas s’attendre à être aidé par une quelconque déformation à ce niveau. Il vous faudra donc de grosses cuisses pour taper dedans et générer quelques départs canon. Une fois lancé, la qualité des roues et leur faible inertie permettent à l’Exceed de filer à grande vitesse.

En côte, l’Exceed profite de sa faible masse pour jouer les premiers rôles. Le tube de selle redressé à 74° distille une bonne position en montée, de quoi garantir une stabilité hors pair. Par contre, tant que l’on enroule le braquet, grimper reste assez facile, et si on a la puissance, on arrivera en haut sans trop taper dans le cardio. Par contre, cela se complique avec un trop gros braquet. Il faut alors se battre avec la boîte de pédalier qui ne bouge pas d’un iota, et la rigidité latérale sans faille du cadre, pour en tirer la quintessence. Autant être clair, si vous choisissez d’acheter l’Exceed en version monoplateau, il faudra bien choisir votre denture à l’avant pour pouvoir enchaîner les kilomètres sans trop devoir vous dépouiller dans les côtes.

Avec l’Exceed, on a le sentiment de toujours rouler sur le fil du rasoir. A son guidon, on ne s’endort jamais

Dans les courbes, on sent la machine ultra-précise, et surtout très réactive. On tire donc tout le parti de la nouvelle géométrie pour balancer le vélo dans un enchaînement de virages. On inscrit le vélo dans les sinueux avec une précision diabolique. Les bases courtes sur ce 29 pouces permettent à l’arrière de tourner dans un mouchoir de poche, pour peu que l’on inscrive avec véhémence la partie avant vers le point de corde. On ressort de la courbe et on se remet en danseuse pour bondir encore plus vite dans le petit bout de ligne droite qui conditionne l’entrée vers la prochaine courbe. Le vélo bondit littéralement, faisant preuve d’une vivacité incomparable. Problème, il pêche par un excès de remontée d’informations dans le dos. L’arrière saute au grès des irrégularités rencontrées sur le parcours. C’est alors autant de motricité en moins, et de contrôle difficile du vélo lorsqu’il s’agit de rester collé au peloton. C’est d’autant plus flagrant qu’à l’avant, la fourche, une fois bien réglée (3 Token, et 20 psi de moins que préconisé), garde un cap imperturbable sur les bosses. Côté confort, Canyon annonce 10,9 mm “d’amplitude” de mouvement sur ce nouvel Exceed au niveau de la selle. Alors oui, la tige de selle apporte un peu de confort, même si le mouvement de va-et-vient perturbe quand même le pédalage sur le plat, au point de faire sauter le fessier à chaque révolution, mais on se demande où est passée la flexion du cadre annoncée par les ingénieurs, et donc le grip. D’ailleurs pour s’en convaincre, nous avons fait une sortie avec une tige de selle classique… A ne pas reproduire. Waouh, ça tape sévère ! Inutile de mettre en cause les roues DT Swiss, elles ne sont pas réputées pour être super rigides en frontal, c’est bien au niveau du cadre que cela se joue. Du coup on se demande comment Alban Lakata arrive à faire des journées entières à rouler sur l’Exceed. Franchement, après 40 km de sortie, on subit le vélo. Si l’on ajoute les 25 premiers kilomètres passés à jouer les pilotes pro à son guidon à profiter de la faible masse de l’engin pour jouer les premiers de la classe dans les côtes, placez quelques accélérations pour dégoûter les potes, et vous aurez intérêt à prévoir un après-midi de libre si vous roulez le matin, parce que vous serez bon pour une bonne sieste de récupération ! Pas de doute, le pilotage en douceur lui convient nettement mieux. Pourtant en descente, l’Exceed impressionne par sa facilité à passer d’une trajectoire à l’autre, dans une sérénité au niveau du pilotage qui vous permet de lâcher les freins. Le vélo répond typiquement aux nouvelles directions plus spectaculaires des circuits en coupe du monde de cross-country. Stabilité de l’avant, et boîte de pédalier basse comme il faut, l’arrière qui se place facilement, les sections techniques seront avalées sans soucis, enfin, si vous changez les Continental par des modèles un peu plus costauds.

Avec ce nouvel Exceed CF SLX, Canyon a créé un vélo de course, dédié uniquement à course, et à réserver à des pilotes déjà bien affûtés/chevronnés qui n’ont pas le confort comme critère de choix sur un semi rigide. Performant, mais difficile à en tirer la quintessence, l’Exceed CF SLX se présente plus comme un complément au Grand Canyon CF SLX, que son remplaçant. Ce dernier est plus confortable, certes moins performant, mais plus accessible au plus grand nombre, et de fait, vous pourrez plus facilement envisager de longues sorties à son guidon. A méditer lors de votre achat.

Ce qu’il faudrait changer

DR T. Zaniroli
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Les pneus ! Non pas que leur profil soit mauvais, au contraire. Le grip est là, et Canyon laisse en plus la possibilité de les monter en tubeless (d’origine le vélo est reçu monté en chambre, mais Canyon laisse à disposition des valves tubeless dans la boîte). C’est sur le compte de leur solidité qu’ils sont à remettre en cause. Ils sont fragiles, et le moindre petit silex rencontré le découpe en deux temps trois mouvements.

Par ailleurs, nous avons eu quelques soucis à déclarer. Le premier concerne le cheminement de la gaine de frein avant du Shimano XT avec la RockShox RS-1. A chaque compression de la fourche, la gaine qui avait du mal à coulisser finissait pas frotter les rayons. Une expérience que nous n’avons jamais eu jusqu’alors avec une RS-1, montée cependant toujours avec des freins de la maison-mère : Sram/Avid. Un petit bricolage maison (ajout d’un guide avec des colliers Rilsan©), et le tour a été joué. Autre mésaventure, le pédalier RaceFace qui subit la faible déformation de la boîte de pédalier du cadre, et donc sur lequel est reportée une bonne partie de la puissance du pilote. Résultat, le plateau a tendance à vouloir lécher la fourchette de dérailleur lorsque l’on est en appui. Par ailleurs, il a fallu redonner un coup de resserrage sur les vis cheminée du grand plateau (attention grosse clé Torx). Enfin, nous avons été surpris par la vitesse avec laquelle la chaîne et la cassette Shimano ont marqué. En 150 km, les pignons sont déjà marqués tandis que la chaîne laisse un petit jeu frontal lorsque l’on appuie sur les pédales. A surveiller…

Caractéristiques

FICHE TECHNIQUE : Tailles : XS (27.5”), S, M, L, XL – Modèle d’essai : M – Cadre : carbone – Fourche : RockShox RS-1 – Freins : Shimano XT, ø180/160 mm – Dérailleur arrière : Shimano XT – Dérailleur avant : Shimano XT – Pédalier : Race Face Next SL, 38/28 dents – Commandes : Shimano XT – Cassette : Shimano XT, 11-40 v. – Roues : Dt Swiss XR 1491 Spline – Pneus : Continental X-King RaceSport, 29’’x2.2 – Potence : Canyon V14, 80 mm – Cintre : Canyon H20 Flat CF, 720 mm – Tige de selle : Canyon S25 VCLS 2.0 CF, ø30,9 mm – Selle : Fizik Tundra 2 Mg – GEOMETRIE : Taille M – Tube supérieur : 600 mm – Tube de selle : 445 mm – Angle de direction : 69,5° – Angle de tube de selle : 74° – Bases : 432 – Empattement total : 1 110 mm – Hauteur de boîtier : 308 mm – Reach : 425 mm – Stack : 611 mm –

Distributeur : Canyon, Contact : www.canyon.com

RENDEMENT [star rating=”4.5″]
CONFORT [star rating=”2″]
MANIABILITE [star rating=”4″]
STABILITE [star rating=”4″]
PRIX/EQUIPEMENT [star rating=”4″]

[quote] On aime : Rendement • Vraie bête de course • Prix toujours compétitif
On regrette : Où est passé le confort ? • Réservé à la compétition • Pneus de salon.[/quote]